De petits colocataires dont personne ne veut

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Par Claude-Hélène Desrosiers
De petits colocataires dont personne ne veut
Nathaniel Leavey, directeur des Entreprises Maheu, tient ici un nid de guêpes. (Photo: Claude-Hélène Desrosiers)

INSECTES. À l’approche des vacances et des déménagements, le moment est opportun pour réfléchir aux punaises de lits, aux fourmis charpentières et autres insectes indésirables chez soi. La prévention est de mise avant de partir dans le Sud ou en achetant cette magnifique table à café importée.

Il est de plus en plus fréquent qu’on ramène des punaises de lit de voyage. Avec les gens qui se promènent plus que jamais un peu partout sur la planète, la possibilité augmente de rapporter des souvenirs de vacances dont on ne veut pas. «Ça arrive autant dans le Sud qu’en Europe. On n’est à l’abri nulle part, et ce, autant dans les hôtels cinq étoiles que dans les auberges de jeunesse», affirme Nathaniel Leavey, directeur des Entreprises Maheu, qui sont spécialisées en gestion parasitaire.

Pour prévenir, l’expert recommande d’être vigilant. Il ne s’agit pas d’aller en voyage avec des produits et de traiter toute la chambre «au cas où». Il faut observer. À l’hôtel, on peut lever les coins du drap contour, regarder les coutures du matelas, le lever pour voir entre celui-ci et le sommier. Y a-t-il ce qui ressemble à de petits grains de poivre? Ce sont des excréments de punaises. Sachant que les punaises auront 7 à 8 mues, est-ce qu’on observe des peaux de punaises?

«Quand la punaise pique, ça lui prend de 10 à 12 minutes pour manger. C’est long, donc elle se rend vulnérable pendant ce temps-là», explique M. Leavey. En comparaison, quand une puce pique, elle est tout de suite remplie de sang, puis elle s’en va. Même chose pour le maringouin. La punaise doit donc s’assurer que l’humain qu’elle parasite dort et va rester tranquille. «Elle est sensible aux vibrations, aux odeurs, à la chaleur qu’on dégage en dormant. Elle est attirée par notre respiration, le gaz carbonique, et elle va piquer entre les épaules et la taille. C’est l’indice ultime d’une punaise. Elle ne pique pas sur les jambes», précise Nathaniel Leavey.

Pour lui, il s’agit d’une situation difficile à régler dans une maison. Un premier traitement, suivi d’un deuxième 21 jours après, et c’est souvent réglé. C’est plutôt la collaboration des gens qui peuvent poser problème. «Parfois on arrive dans un logement et c’est embourbé, insalubre, les gens ne sont pas préparés. On demande de laver tout le linge, de passer la balayeuse le plus possible, de ranger les choses pour qu’on puisse traiter dans les commodes, dans les bureaux… Mais quelques fois, on a du mal à mettre un pied devant l’autre dans l’appartement», remarque l’expert.

S’il s’agit d’un immeuble résidentiel, il faut souvent traiter l’immeuble au complet. Si on est chanceux, ce ne sont pas tous les logements qui sont contaminés. «On voit de plus en plus de centres de personnes âgées. Imaginez, il y a 100 chambres, il y en a une qui est infestée… On perd le contrôle rapidement».

On peut expliquer l’augmentation des cas de punaises de lit par plusieurs facteurs. D’abord, les produits insecticides sont beaucoup moins puissants depuis 10 ans. Ils sont beaucoup moins toxiques, par ailleurs. Nathaniel Leavey invite les gens à utiliser les bons produits. Parfois, certains sont paniqués par la présence d’indésirables chez eux et ils veulent le produit le plus fort, qui tue le plus vite… Mais il faut penser à tout l’écosystème : le jardin sur le terrain, l’enfant qui se promène partout… «Il y a des gens qui mettent du liquide de refroidissement (prestone) au lieu de pesticide. Oui ça va tuer la vermine, mais pas seulement ça! C’est important d’utiliser les bons produits».

Vu qu’ils sont moins forts aujourd’hui, on doit maintenant réfléchir davantage pour trouver la source du problème. «Il faut connaitre l’animal. Si c’est un animal de grain, je vais chercher dans le garde-manger, ou c’est peut-être la nourriture du chien. Si c’est un parasite, est-ce que c’est un parasite humain ou un pou d’oiseau, une puce de chien? Si c’est un pou d’oiseau, ça peut indiquer qu’il y a des oiseaux dans la toiture. Un tambour africain? Ça peut être un insecte de bois, même si ça fait un an que la personne l’a acheté, parce que ces insectes peuvent se développer très lentement». Bref, il faut réfléchir afin de cibler les traitements.

Une autre cause de l’augmentation des cas : la mondialisation, les voyages, l’immigration. On commande en ligne, on se procure des produits qui viennent du bout du monde. Maintenant, il arrive que Les Entreprises Maheu soient sollicitées pour des insectes exotiques. Par exemple, on peut les appeler parce qu’un scorpion ou une grosse araignée est trouvé dans un conteneur. Une veuve noire dans un régime de bananes, ce n’est pas une légende, c’est arrivé.

Questionné sur ce qu’il a vu de plus impressionnant dans sa carrière, M. Leavey parle d’infestation de longue date de punaises de lit. «Ça peut être très spectaculaire quand ça fait un bout que les punaises de lit sont installées. Parfois, on voit des gens qui ont d’autres problématiques sociales qui amènent de l’insalubrité. Si ça fait un an que ça dure, il peut y avoir des centaines de milliers de punaises. Nous on n’a pas peur de ça, mais ça reste très impressionnant quand il y en a autant. C’est difficile de voir une si grande misère humaine aussi», ajoute-t-il.

La fourmi charpentière

C’est un problème qu’on retrouve beaucoup à Drummondville. On a beaucoup de boisés, de la campagne tout autour. Si on en voit une, pas de panique! Elle peut être entrée par une fenêtre, une porte, une craque, une fissure… «Voir une mouche qui rentre dans la maison, ça ne veut pas dire qu’on a un problème de déchets», s’exclame M. Leavey. Dans le cas où on en aurait tous les jours, on peut traiter l’extérieur de la maison. Lorsqu’on contrôle bien l’extérieur et qu’il y en a encore, il faut traiter plus en profondeur et chercher la cause. Y a-t-il déjà eu un dégât d’eau et les fourmis se sont installées dans ce morceau de bois là? On peut en voir dans de la mousse de polystyrène aussi, s’il a été posé sur un solage trop frais, ou encore dans l’uréthane. La fourmi charpentière ne se nourrit pas de bois, mais bien de moisissures. On va chercher du bran de scie, ce qui nous mène au nid.

En résumé, pour dormir sur ses deux oreilles, on vérifie les matelas à l’hôtel, on fait attention à tout ce qui est seconde main et également les articles qui viennent de l’étranger. Le plus problématique serait la nourriture importée, mais il ne faut pas négliger les objets en fibres naturelles (une tuque en laine non traitée) et les meubles de bois, surtout s’il n’a pas été traité ni verni.

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