Les gestes sexuels n’étaient pas un jeu

CAROLINE LEPAGE
Les gestes sexuels n’étaient pas un jeu
Le Palais de justice de Drummondville. (Photo : Photo d'archives)

JUSTICE. Un quinquagénaire qui prétend avoir touché les parties intimes d’une fillette par accident pendant qu’il jouait à la «tag» a livré une version «farfelue», selon la juge, qui qualifie le geste acrobatique digne du Cirque du Soleil.

Le conjoint d’une grand-maman qui gardait ses deux petites-filles du 6 au 9 août 2019 a été reconnu coupable de gestes sexuels à l’endroit de l’aînée alors qu’elle avait environ 12 ans.

Les faits reprochés sont survenus alors que l’accusé jouait dans le «pit de sable», se promenait en VTT avec les deux fillettes, dont il faut taire l’identité. L’individu profitait aussi de l’absence de la grand-maman pour visionner des films pornographiques et se masturber devant la jeune fille.

La plus vieille a notamment témoigné lors des audiences des 2 et 4 novembre 2022, révélant que l’homme l’a flattée au niveau des seins, a descendu sa main au niveau de son vagin et a fait les gestes à plus d’une reprise de haut en bas.

Banalisation des gestes

Le procureur de l’accusé, Me François Lafrenière, a suggéré que ces gestes anodins étaient posés dans un contexte de jeu.

«Le Tribunal est en désaccord avec cette prétention», écrit l’honorable Julie Beauchesne, dans son jugement du 16 décembre 2022.

Selon elle, les parties du corps touchées sont des indices révélateurs de son intention d’agir à des fins d’ordre sexuel. Il n’y a pas de place pour un doute raisonnable quant à la nature des touchers.

«Quant au fait d’avoir exhibé ses organes génitaux, le Tribunal n’entretient aucun doute que l’accusé s’est exhibé devant l’enfant à des fins d’ordre sexuel. D’une part, cela se passe de manière concomitante avec le visionnement d’un film pornographique et d’autre part, il regarde l’enfant», fait-elle valoir.

En plus des contradictions qui rendent suspecte la version des événements livrée par l’accusé, celui-ci a fait preuve, selon la juge, d’une attitude préoccupante durant le procès au palais de justice de Drummondville.

«Il rit et tente de faire rire la soussignée en précisant qu’à son âge “on écoute plus ça des films de cul”», rapporte-t-elle, avec répréhension.

Elle la croit, mais…

Concernant la plus jeune des victimes alléguées, l’homme a dit avoir joué à la «tag» avec l’enfant de sept ans et qu’ils ont couru dans la pente du «pit de sable». Au moment où il pense perdre l’équilibre et tomber sur l’enfant, il a expliqué l’avoir saisi en «sandwich» pour ensuite la projeter sur son épaule.

En mimant l’événement en salle de cour, il a expliqué que son bras droit longeait le dos de l’enfant et que sa main droite se trouvait sur ses fesses. S’il a touché les parties intimes de la petite, c’était pour éviter de lui faire mal en tombant, a-t-il justifié.

«S’il est en train de tomber, il peut simplement pousser l’enfant sur le côté pour éviter de lui tomber dessus ou lui saisir le bras. Il peut également se projeter vers l’arrière pour arrêter sa chute», a évalué la magistrate.

Selon elle, il s’agit d’une version invraisemblable, considérant que la fillette était plus basse que lui dans la descente.

«C’est un homme de près de 60 ans qui pèse environ 200 livres et mesure près de six pieds, suivant l’estimé du Tribunal. Il aurait alors réussi un geste acrobatique digne du Cirque du Soleil», plaide la juge Beauchesne.

Malgré tout, le Tribunal a acquitté ce dernier des chefs concernant la plus jeune, même s’il la croit, car la version de la petite était dépourvue de détails. Il devenait impossible de fonder un verdict de culpabilité hors de tout doute raisonnable.

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