L’insuffisance cardiaque tue 20 % plus de femmes que d’hommes

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Par Cynthia Martel
L’insuffisance cardiaque tue 20 % plus de femmes que d’hommes
Dre Marie-Kristelle Ross, cardiologue à l'Hôtel-Dieu de Lévis et porte-parole de Cœur + AVC. (Photo : Gracieuseté)

SANTÉ. Les maladies cardiaques et les accidents vasculaires cérébraux sont la première cause de décès prématuré chez les femmes au Canada. En ce Mois du cœur, la Fondation du cœur + AVC souhaite sensibiliser la population sur cette réalité tout en dévoilant un plan d’action pour encore mieux soigner ces personnes aux prises avec ce grave problème de santé.

Selon l’organisme, l’insuffisance cardiaque tue 20 % plus de femmes que d’hommes au pays. Elles sont près de cinq fois plus susceptibles de mourir de cette maladie chronique que du cancer du sein. Plusieurs raisons expliquent cette différence. D’abord, les femmes sont généralement plus âgées lorsque leur insuffisance cardiaque survient. De plus, elles ont tendance à avoir plus de comorbidités et de complexités qui contribuent à de moins bons résultats. Elles sont moins aussi à participer à des essais cliniques, expliquant le manque de clarté des réponses aux traitements et thérapies spécifiques. Qui plus est, on observe des associations plus rares avec la grossesse et certains traitements du cancer. Enfin, les symptômes qui se manifestent diffèrent de ceux des hommes.

«Souvent, lorsqu’on pense aux maladies cardiaques, on a comme image un homme, fin cinquantaine, avec un petit ventre. Mais il faut savoir que les femmes peuvent avoir ces problèmes, c’est juste que la présentation est atypique. Les femmes n’ont pas les symptômes classiques qu’on connaît, donc elles le reconnaissent moins alors elles consultent plus tardivement», fait savoir Dre Marie-Kristelle Ross, cardiologue à l’Hôtel-Dieu de Lévis et porte-parole de Cœur + AVC.

En d’autres mots, les symptômes chez les femmes sont moins définis. Les douleurs thoraciques sont moins prononcées et laissent plutôt place à la fatigue, un essoufflement et l’anxiété.

«Si l’on remarque quelque chose qui nous préoccupe, que ce soit un essoufflement plus marqué, de l’enflure dans les jambes, une douleur dans la poitrine, il ne faut pas banaliser ces symptômes et ne pas tarder et hésiter à consulter, même dans le contexte actuel de la pandémie, car on a vu beaucoup de gens qui ont attendu et qui se sont retrouvés avec de graves complications. C’est à partir d’un diagnostic qu’on peut faire un plan de traitement et prendre en charge la maladie dans son ensemble», soutient la docteur Ross, indiquant qu’adopter de saines habitudes de vie diminue les risques de problèmes cardiaques.

Plan d’action

Malgré certains progrès, estime la Dre Ross, il reste difficile de se retrouver dans notre système de santé cloisonné et de combler les importantes lacunes en matière de diagnostic, de traitements et de soutien.

«C’est important d’avoir une équipe multidisciplinaire autour des personnes atteintes d’insuffisance cardiaque pour les éduquer, répondre à leurs besoins. Il y a un bon travail qui a été fait, mais on peut faire mieux et on doit faire mieux à ce niveau, aussi en ce qui a trait à la recherche et développement.»

Par exemple, 27 % des hôpitaux n’ont pas accès à l’analyse des peptides natriurétiques, une méthode clé pour diagnostiquer l’insuffisance cardiaque, et dans 16 % d’entre eux, le personnel ne suit pas les lignes directives publiées en matière de soins de l’insuffisance cardiaque.

Cœur + AVC a réuni des organismes axés sur les maladies du cœur, notamment pour piloter un plan d’action, éclairé par des infirmières, des cardiologues, des pharmaciens, et des personnes vivant avec une insuffisance cardiaque et leurs aidants. Un diagnostic précoce, des changements au mode de vie, l’accès à des médicaments, des dispositifs médicaux (tels que les stimulateurs cardiaques, les valvules cardiaques artificielles ou les pompes) et du soutien communautaire sont autant d’éléments sur lesquels le plan d’action met l’accent.

Une maladie en croissance

Selon les experts, la hausse du taux d’insuffisance cardiaque se poursuivra en raison du vieillissement de la population et de l’augmentation du nombre de personnes jeunes recevant un diagnostic (grâce à de meilleurs outils de détection et en raison de l’augmentation de certains facteurs de risque).

De surcroît, la COVID-19 peut provoquer des lésions cardiaques susceptibles d’entraîner une insuffisance cardiaque. Sans compter qu’en perturbant les services de santé, la pandémie a empêché des personnes atteintes de maladies du cœur d’accéder à des soins, ce qui a aggravé leur état.

Près de la moitié des personnes vivant avec une insuffisance cardiaque meurent dans les cinq ans suivant le diagnostic.

On qualifie l’insuffisance cardiaque de maladie «de la porte tournante» parce que sur cinq patients admis à cause de celle-ci, l’un d’entre eux sera réadmis dans le mois suivant. D’ici 2030, on prévoit que les coûts de soins de santé associés à l’insuffisance cardiaque atteindront 2,8 milliards de dollars par année au Canada.

Quelques statistiques

– Sur 750 000 personnes atteintes d’insuffisance cardiaque au pays, 169 930 le sont au Québec.

– 53 % des femmes qui présentent des symptômes de crise cardiaque ne les reconnaissent pas.

– Les maladies du cœur et les AVC ont coûté la vie à plus de 32 000 femmes au Canada en 2017. C’est la vie d’une femme toutes les 16 minutes.

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