Vivre comme les autres, malgré la différence

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Par Emmanuelle LeBlond
Vivre comme les autres, malgré la différence
Louis Vendette brandit avec fierté la clé de son premier appartement. (Photo : Ghyslain Bergeron)

TÉMOIGNAGE. Vivant avec une déficience intellectuelle, Louis Vendette a franchi une étape importante dans sa vie, celle d’emménager dans son premier appartement à l’âge de 30 ans. Faire son lit, laver ses vêtements, réchauffer ses repas. Le Drummondvillois cumule les victoires quotidiennes, animé par un grand désir d’apprendre.

Louis a fait le saut en appartement, il y a environ deux mois. L’homme s’est approprié les lieux pour créer un environnement à son image. Au salon, un drap mural à l’effigie du groupe Pink Floyd est accroché, partageant l’espace avec des photos de famille. Dans la chambre, une couverture des Canadiens est déposée soigneusement sur le lit. Juste à côté, quelques casquettes se trouvent sur la commode, témoignant de sa passion pour les équipes sportives.

Le Drummondvillois est passionné par la musique et il adore jouer de la batterie. (Photo: Ghyslain Bergeron)

En ouvrant la porte du bureau, une batterie apparaît, trônant au milieu de la pièce. À la vue de l’instrument, un large sourire se dessine sur le visage de Louis. Il ne peut s’empêcher d’agripper ses baguettes.

«C’est une passion que j’ai depuis longtemps. Je suis capable de jouer. Mes parents m’avaient inscrit à des cours de piano comme ma sœur. Dans ma tête, je me suis dit que j’allais aimer ça. À la fin du cours, la professeure m’a suggéré de jouer de la batterie. Ça a cliqué. J’ai vraiment eu un coup de cœur», raconte-t-il, les étoiles plein les yeux.

Dans sa famille, Louis n’a jamais été mis de côté à cause de sa différence. «On a toujours vécu en se disant qu’il était capable de faire la même chose que les autres. C’est plus long et on prenait d’autres moyens, mais on réussissait. Par exemple, on a pris un professeur privé pour qu’il apprenne à skier», soutient sa mère, Dominique Milot.

Il y a quelques années, ce dernier a communiqué à ses parents le désir d’avoir son propre logement. C’était son rêve. «Je voyais ma sœur aller. Elle a sa maison, son chum et ses enfants. Ça me tentait de faire comme elle et d’avoir un espace à moi. Ça me permet d’être autonome», exprime-t-il. La nouvelle a été bien accueillie.

Louis a été interpellé par la mission de l’organisme Appartenance Drummond, qui vise l’autodétermination des personnes ayant une déficience intellectuelle ou un trouble du spectre de l’autisme, en offrant un service d’hébergement temporaire. Ce dernier a pris contact avec l’équipe pour manifester son intérêt. Si l’immeuble de 14 unités devait être livré en 2021, plusieurs circonstances ont mené au report du projet. Louis et ses parents ont dû se tourner vers une autre solution.

Tout au long du déménagement, Louis Vendette a eu la chance d’être appuyé par ses parents. (Photo: Ghyslain Bergeron)

Cet été, une opportunité s’est présentée à lui. Un logement au centre-ville s’est libéré. «Le propriétaire nous a appelés en juin. Il nous a expliqué qu’il y avait un appartement disponible. On a eu deux mois pour se préparer. Le déménagement a eu lieu en août», mentionne Benoit Vendette.

Faire ses propres choix

En prévision de cette nouvelle étape, Louis a magasiné ses propres meubles. À travers le processus, ce dernier a appris à faire des compromis. «Au début, quand j’ai vu le divan mauve au magasin, je savais que c’était ce que je voulais. Ma mère n’était pas sûre parce que je voulais aussi une chaise rouge. Finalement, j’ai choisi un divan mauve et un fauteuil gris», explique-t-il, avec entrain.

Le Drummondvillois devait également se procurer les meubles de sa chambre, la laveuse et la sécheuse ainsi que le poêle et le réfrigérateur. Quant au déménagement, il s’est déroulé sur une période d’une semaine, favorisant une transition graduelle.

Maintenant, Louis a une routine bien à lui. Le jour, il se déplace en transport en commun en direction de son stage en intégration sociale à l’école Marie-Rivier. De retour à l’appartement, l’homme réchauffe son repas, affectueusement concocté par sa mère. À l’occasion, il fait le ménage et lave ses vêtements. Dans ses temps libres, Louis peut même se rendre au Centre Marcel-Dionne, afin d’encourager les Voltigeurs.

Jour après jour, Louis Vendette apprend à être autonome. (Photo: Ghyslain Bergeron)

Des règles précises ont été établies pour les visiteurs. «L’autre fois, je me suis fait chicaner parce que je suis venue le voir et je n’ai pas appelé avant», se remémore sa mère en rigolant.

Apprendre à tous les niveaux

L’organisme Appartenance Drummond a suivi avec attention le parcours de Louis, qui est son porte-parole. Selon le président, Jean Lauzière, ce dernier n’est pas le seul à avoir grandi à travers cette expérience. «Les parents sont en train de faire un apprentissage aussi. En ayant un enfant différent, ils ont investi dans leur enfant. Il y a un attachement qui est là. Ils ne s’aperçoivent pas qu’il y a une protection. Là, ils sont en train de couper le cordon, comme tous les parents qui vivent le déménagement de leur enfant», indique-t-il.

«Quand on va bâtir Appartenance, les parents vont faire partie de l’organisme parce qu’il faut qu’ils s’entraident dans ce cheminement qui est difficile. Parfois, ils ont envie de reculer. C’est une grosse étape», complète-t-il.

Dans tous les cas, l’entourage de Louis se réjouit de le voir s’épanouir dans son nouvel environnement. «Il y a beaucoup de fierté. Au début, je me demandais si on avait fait la bonne chose. Plus ça va, plus je me rends compte que nous avons pris une bonne décision, autant pour nous que pour lui», conclut sa mère.

 

Appartenance Drummond

L’organisme Appartenance Drummond propose une formule d’hébergement qui est différente des offres résidentielles de la région, pour les personnes ayant une déficience intellectuelle et un trouble du spectre de l’autisme.

Lorsque l’immeuble à logements sera construit, les résidents pourront emménager dans un appartement temporaire, dans le but d’apprendre à vivre de manière autonome. Ils feront des apprentissages, en étant accompagnés par des intervenants. Lorsqu’ils seront prêts, ils pourront intégrer un logement dans la communauté.

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