Sommes-nous courageux? (Tribune libre)

Sommes-nous courageux? (Tribune libre)
Lettre d'opinion (Photo : Illustration, L'Express)

TRIBUNE LIBRE. Depuis presque deux ans, nous sommes plongés dans un univers qui nous semble plus que jamais, chaotique. Au premier plan, la pandémie qui nous freine dans notre quotidien et dans certains de nos projets. Les changements climatiques ou plutôt la crise climatique avec ses six canicules au cours du même été qui s’achève (qu’est-ce que ce sera l’été prochain?). Les conséquences dévastatrices de cette crise sur l’agriculture, sur l’environnement, sur la biodiversité, sur nos forêts, sur nos cours d’eau. La liste est longue.

Et pour couronner le tout : les élections. Fédérales et municipales. Elles brouillent nos horizons. Et à travers tout ça, comme si on n’en avait pas assez, les élections provinciales de l’année prochaine qui s’invitent déjà au menu… Parfois je pense à ces bouliers où tous les éléments s’agitent, se frappent les uns les autres et ne vont nulle part.

Nous sommes au milieu de ce tourbillon. Et il faut réfléchir… Ce n’est pas facile quand toutes les voix se font entendre dans une cacophonie sans nom. Qui croire? Notre avenir se calque de plus en plus sur les intérêts des grands donateurs des partis, sur les lobbys, sur les ambitions financières des compagnies… qui au fond, il faut se l’avouer, dirigent nos destinées par-dessus les dirigeants de notre pays, de notre province et même par-dessus notre monde municipal. Qui a cure de nos besoins véritables, des besoins essentiels de notre population, de notre communauté?

Je pense ici à l’eau, ce bien si essentiel à la vie; sans elle, aucune vie n’est possible. Près de nous, il y a la rivière Saint-François de laquelle nous tirons notre eau  potable;  or elle est menacée. Le mégadépotoir de Waste Management de St-Nicéphore jouxte la rivière Saint-François et menace sa salubrité et son utilisation. Cette situation devrait nous alerter sur l’urgence de nous défaire de ce dépotoir et surtout de ne pas l’agrandir comme le prévoit le décret du ministère de l’Environnement et de la lutte contre les changements climatiques (MELCC) que le gouvernement Legault s’apprête à adopter en conseil des ministres au cours des prochains jours ou des prochaines semaines.

Est-ce que le gouvernement du Québec se soucie du besoin des Drummondvillois de protéger leur eau? Est-ce qu’il se soucie de leur opposition à ce mégadépotoir et à son agrandissement? Est-ce qu’il se soucie de ses effets contaminants sur les nappes d’eau souterraines?

Il semblerait que non. Quand les représentants du MELCC sont venus nous rencontrer le 24 août dernier, ils n’avaient que des chiffres en bouche. Rien sur la protection de la santé des gens, rien sur l’absence d’acceptabilité sociale, rien sur le principe de « précaution » de la Loi sur le développement durable qui devrait guider l’action de l’administration publique. Que des chiffres!!!

Les « méga »

Depuis une vingtaine d’années au moins, nous nageons dans la « culture des mégas » : mégafermes industrielles, mégacultures de maïs et de soya, mégaporcheries, mégadépotoirs, etc. On ne se soucie pas des effets dévastateurs de ces « méga » sur l’environnement, sur l’appauvrissement des sols, sur la vie de la biodiversité, sur les systèmes hydriques. Le seul objectif : faire de l’agent, beaucoup d’argent.

Le gouvernement du Québec entend obliger, par décret, la Ville de Drummondville à accepter l’agrandissement du mégadépotoir actuel en super  mégadépotoir en créant une ZIS (zone d’intervention spéciale). Cette ZIS fait fi de la règlementation municipale sur le zonage, fait fi de l’absence d’acceptabilité sociale où la population s’est prononcée négativement  à l’occasion de référendums, fait fi des tribunaux qui ont donné raison aux citoyens. Le gouvernement agit en matamore.

Aussitôt le décret sur la ZIS adopté par le conseil des ministres, la Ville s’est engagée à s’y opposer en faisant immédiatement appel aux tribunaux.

La Chambre de commerce et industrie Drummond (CCID) s’est déclarée favorable au décret, car celui-ci éviterait aux entreprises, aux commerçants et aux institutions de payer plus cher pour transporter leurs déchets ailleurs qu’au dépotoir de St-Nicéphore. Je me fais la réflexion suivante : les propriétaires de ces industries, de ces commerces et de ces entreprises ont des familles, des enfants et pour certains, des petits-enfants. Comment se fait-il qu’ils soient d’accord avec le décret qui favorise l’agrandissement du dépotoir actuel alors que l’eau à boire est menacée. Est-ce que l’argent aveuglerait à ce point?

Les élections municipales

Les élections municipales feront partie de notre quotidien jusqu’au 7 novembre prochain. À Drummondville, aucune des personnes de l’équipe Carrier ne parle des effets de la crise climatique sur nos vies, ni de plan d’actions sérieux pour en amoindrir les effets. C’est comme si tout se passait ailleurs, mais pas chez nous.

Et au premier chef : le dépotoir. Ils n’en parlent pas. Ils ne parlent pas de la menace de ce dépotoir sur notre alimentation en eau potable. Lorsque le maire a été questionné lors de la séance du conseil municipal du 7 septembre dernier, sur les résultats des analyses faites par le Ministère, le directeur général de la ville a répondu qu’il ne disposait pas de ces informations. De deux choses l’une : ou bien il manque à son devoir de  colliger les données d’analyse qui pourraient avoir une incidence sur la santé de notre population, ou bien il les connaît et il ne veut pas les divulguer parce que trop inquiétantes…

Il me semble que le temps est venu de s’occuper des « vraies affaires », pas de petits projets qui nous étourdissent et nous font oublier l’essentiel, mais d’un projet unique qui nous unit et qui garantit à nos enfants l’eau qu’ils pourront boire en toute quiétude. Il n’y a que ceux qui n’en ont pas qui en connaissent le prix.

Alors soyons courageux et protégeons notre rivière Saint-François en disant NON au projet d’agrandissement du dépotoir de St-Nicéphore. Et exigeons de ceux qui se présentent à la mairie et dans nos quartiers qu’ils reconnaissent l’urgence d’agir.

Michelle Théroux, Drummondville

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