Site d’enfouissement : la Ville va contester le décret, si elle le peut

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Par Cynthia Martel
Site d’enfouissement : la Ville va contester le décret, si elle le peut
Le maire Alain Carrier discutant avec des représentants du GODD. (Photo : Ghyslain Bergeron)

ENVIRONNEMENT. La Ville de Drummondville compte contester la décision de Québec, si elle peut le faire, relativement à l’autorisation par décret de la poursuite des activités du site d’enfouissement de Saint-Nicéphore.

«On va voir au niveau légal si on peut contester et si on peut, on va le faire», a indiqué le maire de Drummondville, Alain Carrier, au terme d’une rencontre entre le ministre de l’Environnement, Benoit Charette, le député de Johnson, André Lamontagne, et les élus municipaux, jeudi matin au Centrexpo Cogeco.

Affirmant avoir eu «trois ou quatre» discussions avec le bureau du ministre de l’Environnement au cours des derniers mois, le maire s’est dit surpris du projet de décret publié hier dans la Gazette officielle du Québec. «De un, je l’ai su par vous et de deux, je suis surpris du délai accordé. On vient autoriser dix ans, mais en même temps, quand on regarde l’emplacement, c’est l’équivalent de l’espace qui a été pris pendant trente ans. Donc ma crainte, c’est que ça va être exploité encore pour 30 ans», a-t-il expliqué.

Précisément, le gouvernement caquiste autorise une zone d’intervention spéciale, faisant suite au décret émis en septembre dernier qui permet à Waste Management (WM) d’enfouir 430 000 tonnes de matières résiduelles par année pendant 10 ans sur la phase 3B. «Comme ça nous est imposé, il faut réagir et s’assurer que s’il y a une continuité, que ce soit bien fait», a insisté M. Carrier. En ce sens, la Ville entend formuler des demandes claires au gouvernement et à WM, notamment en ce qui concerne la qualité de l’eau provenant des puits situés autour du site et les compensations des municipalités utilisatrices du lieu d’enfouissement.

«Ce serait pour nous facilitant si le gouvernement imposait dans le décret des compensations, car c’est nous qui devrons vivre avec [les déchets] dans le futur», a-t-il laissé entendre.

Une consultation publique se tiendra le 28 juillet, et ce, avant l’adoption du décret. Quant à la Ville, elle aura un délai d’environ 30 jours à compter de la publication du décret final dans la Gazette officielle du Québec pour le contester.

Le Groupe des opposants mécontent

Mécontent de la décision du gouvernement Legault, le Groupe des opposants au dépotoir de Drummondville (GODD) s’est déplacé jeudi au Centrexpo Cogeco dans l’espoir de se faire entendre par le ministre Charette. «On espérait beaucoup que ça n’arrive pas. C’est un geste disgracieux envers la population qui a voté contre», s’est désolé Jean-Guy Forcier, porte-parole du GODD.

Benoit Charette. (Photo Ghyslain Bergeron)

«Le ministre peut bien prendre cette décision, mais un dépotoir, c’est une contrainte anthropique, donc il n’a pas le droit de nous l’obliger, car ça peut porter atteinte à notre santé, sécurité et protection, d’autant plus qu’il n’y a pas d’acceptabilité sociale», s’est-il dit d’avis.

Au terme de la rencontre avec les élus municipaux et des entrevues avec les médias, le ministre de l’Environnement a pris quelques minutes pour rencontrer M. Forcier et une autre représentante du GODD. «Il a été bien gentil de prendre le temps de s’asseoir avec nous. Par contre, il nous comprend, mais ne nous écoute pas», a souligné M. Forcier.

Malgré tout, le porte-parole garde espoir. «La Ville défend les intérêts de la population dans ce dossier et on va être solidaire de la Ville tant et aussi longtemps qu’elle va s’objecter à l’agrandissement du site d’enfouissement. Notre grande espérance, c’est que la Ville prenne des procédures en justice contre le gouvernement», a-t-il soutenu.

Des citoyens s’expriment

L’Express est allé à la rencontre de citoyens demeurant à proximité du site d’enfouissement pour connaître leur avis.

«J’ai de la parenté dans le coin du Club du Faisan. Il y a déjà une odeur, mais ça ne sent pas tout le temps. Si la pression atmosphérique est plus basse, on va le sentir. Je n’irais pas rester là, même si les odeurs sont moins pires qu’il y a vingt ans. Quelle serait la solution? Envoyer les déchets ailleurs? À mon avis, ça ne ferait que changer le mal de place.» – Nelson Plier, citoyen du secteur Saint-Nicéphore

«Présentement, ça sent moins, mais ça sentait dans le temps. J’ai peur que les odeurs reviennent et que ça touche d’autres quartiers. On n’a pas besoin de ça.» – Jacques Lambert, propriétaire d’une résidence au Club du Faisan

«Ils veulent agrandir, mais on a assez de vidanges. Ils peuvent mettre les poubelles à d’autres endroits. Même si j’habite à L’Avenir, je me sens concerné. Avant, on avait le droit d’aller domper là. On payait pour ça. On ne peut plus maintenant. Le dernier coup, on m’a reviré de bord. Et là, il faudrait accepter les poubelles d’ailleurs. Ça m’insulte. On n’a pas besoin de leurs vidanges et de leur pollution.» – François Huberdeau

«Ça vaut la peine d’utiliser l’espace qu’on a pour mettre les déchets, peu importe d’où ils viennent. Il faut les mettre quelque part. L’agrandissement ne me dérange pas. Il y a des dangers bien pires que ça.» – Une citoyenne habitant sur la rue Dubé

 

(Avec la collaboration d’Emmanuelle LeBlond)

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