Derrière la facade… les droits des citoyens menacés (Tribune libre)

Derrière la facade… les droits des citoyens menacés (Tribune libre)
Lettre d'opinion (Photo : Illustration, L'Express)

TRIBUNE LIBRE. La scène politique locale a été marquée par des événements et des déclarations ces derniers mois qui laissent penser que le conseil municipal est loin d’être l’institution sérieuse et fonctionnelle que les citoyens supportent avec leurs taxes et à laquelle ils ont le droit. Il y a fort à croire que le conseil est devenu largement dysfonctionnel, sauf peut être sur le plus simple des dossiers.

Quand je repense aux administrations précédentes (Cusson, et à titre intérimaire, Grondin) et à la manière dont elles fonctionnaient, je ne peux m’empêcher de me demander comment les choses en sont arrivées là où nous en sommes maintenant. Qu’est-ce qui pourrait amener un groupe qui a réussi à travailler ensemble pour le bien de la population à atteindre ce point? Qu’est ce qui a changé?

Bien que j’aie l’intention de commenter cette question et d’autres dans un proche avenir, pour le moment, j’invite les lecteurs à tirer leurs propres conclusions.

Avec toute cette bisbille, il est facile de se laisser distraire, mais un regard plus approfondi révèle des menaces très réelles au processus démocratique et aux droits des citoyens ici à Drummondville.

J’irais même jusqu’à dire que si nous ne prenons pas note et n’agissons pas rapidement, nous pourrions voir un changement fondamental dans la façon dont la politique est menée à Drummondville, les citoyens étant les perdants.

Un signe irréfutable :

Le 20 avril, le maire lança officiellement ou officieusement sa campagne de réélection.
Il a également annoncé qu’il présenterait un candidat dans chacun des 12 districts. Mais, bien qu’il interviewera et choisira chaque candidat, il a déclaré qu’il ne formait pas un parti politique.

Franchement! Cette stratégie est si évidente que c’est une insulte à tous les Drummondvillois que l’équipe du maire croit que l’on ne se rendra pas compte qu’il forme un parti déguisé. La seule différence entre son groupe et un parti politique formel est la technicité que son regroupement n’aura pas été légalement enregistré comme tel.

Le maire soutient que les candidats qui se joindront à lui pourront voter comme bon leur semble. «Les gens peuvent dire ce qu’ils ont à dire et peuvent voter pour ou contre un projet du maire dans l’éventualité où tous ces gens-là seraient élus. C’est un bon débat».

Sérieusement? Le maire avait déjà un conseil composé de personnes qui exprimaient leur opinions, débattaient et votaient selon leurs convictions et nous en voyons les résultats, n’est-ce pas?

Selon ses propres mots, il ne veut travailler qu’avec deux des douze membres actuels du conseil. Or, de toute évidence, contrairement à ce qu’il professe, le maire semble préférer de beaucoup diriger une équipe de personnes déjà converties à ses objectifs et qui se sont publiquement engagées à le soutenir plutôt que de se donner la peine d’essayer de créer un consensus entre égaux.

Si ce n’est pas le cas, pourquoi essayer de remplacer les membres actuels du conseil?

Sans aucun doute, M. Carrier sera plus à l’aise dans un environnement où il y a moins de débats et d’opinions dissidentes que dans le conseil actuel.

Dans un tel cas, il se trouverait dans le rôle plus familier de l’homme d’affaires en pleine autorité dirigeant son entreprise comme bon lui semble.

Alors, c’est quoi, ce risque?

Premièrement, je tiens à souligner que le risque auquel je fais allusion est parfaitement légal, mais bien sûr, quelque chose n’est pas nécessairement souhaitable simplement parce que c’est légal.

Deuxièmement, le risque devient plus évident du fait de l’initiative du maire de lancer son «non-parti» mais, bien que le degré de risque puisse varier selon l’individu, il existerait toujours si quelqu’un d’autre était impliqué et adoptait la même stratégie.

Au cours des administrations précédentes cité ci-haut, le conseil municipal de Drummondville étaient composé de conseillers qui n’étaient pas alignés avec un parti politique en particulier. Cela signifie qu’ils n’étaient pas obligés de suivre les lignes directrices d’un parti ou de son chef et, qu’ils ont pu agir dans ce qu’ils considéraient être le meilleur intérêt des citoyens. Plus important encore est le fait que le maire a dû travailler pour parvenir à un consensus, ce qui a nécessité la prise en compte des différents points de vue.

Le geste du maire d’aller vers un système de parti politique augmente le risque qu’un parti qui obtient la majorité absolue puisse, à l’extrême, faire à peu près tout ce qu’il souhaite, sans prendre en compte ce qui est le mieux pour les contribuables dans leur ensemble.

Poussé à l’extrême, cela pourrait amener un maire à utiliser toutes les tactiques qu’il souhaite pour faire avancer ses politiques et ses objectifs, y compris prendre le contrôle absolu du conseil et de l’administration municipale, limiter le débat, museler l’opposition, bafouer les droits des citoyens, éviter de rendre des comptes aux citoyens, et j’en passe.

Un bon exemple serait le stade olympique du maire Jean Drapeau. Bien qu’il était un maire exceptionnel, M. Drapeau a vu le stade comme l’une de ses réalisations majeures et l’a poursuivie malgré le fait que plusieurs pensaient que les travaux auraient dû être confiés à un architecte canadien et que le coût était prohibitif. Le résultat? Problèmes techniques massifs et dépassements de coûts importants. Le résultat aurait probablement été bien différent s’il avait dû prendre en compte des points de vue divergents.

Comme il est dit «Le pouvoir corrompt… Le pouvoir absolu corrompt absolument».

Les candidats :

Mais les conseillers eux, serviront-ils pas de contrepoids? Dans le scenario envisagé, ça c’est leur en demander un peu trop.

Dans un premier temps, pour être clair, la qualité des candidats que le maire choisira importe peu. Le maire aura interviewé les candidats potentiels et choisira évidemment des candidats qui partageront sa vision et ses objectifs. Sinon, quel serait l’intérêt d’une telle initiative?

De plus, soyons honnêtes, les candidats seront redevables à M. Carrier et dans ces circonstances, il est pratiquement impossible d’être vraiment indépendant, même s’ils aimeraient croire le contraire.

En résumé :

Le risque auquel nous sommes confrontés est que le maire et son équipe gagnent suffisamment de districts pour avoir une majorité absolue au conseil. Si cela se produit, il y aura un impact majeur non seulement sur le front politique, mais sur tous les aspects des affaires de la ville, tels que les droits des citoyens, l’analyse et l’approbation des projets, la surveillance financière, etc.

Je recommande fortement que chacun d’ entre nous se pose les questions suivantes :

  • Suis-je à l’aise de céder le contrôle absolu des affaires et des finances de la ville à un groupe restreint d’individus qui pourront essentiellement fonctionner en toute impunité sans aucun moyen pour les citoyens de rester informés, et d’exercer une surveillance ou un contrôle de quelque nature que ce soit?
  • Suis-je à l’aise de donner carte blanche à ce groupe en termes des projets choisis, ce qui équivaudra à un accès illimité à mon portefeuille et aux clés du coffre-fort de Drummondville?
  • Est-ce que je crois vraiment qu’un groupe qui pourra prendre des décisions sans rendre des comptes à quiconque veillera vraiment à mes meilleurs intérêts?
  • Est-ce que je crois vraiment qu’un tel groupe peut mieux représenter les intérêts de tous les drummonvillois qu’un conseil composé de candidats indépendants qui ne sont pas obligés de voter selon les directives d’un partie (nonobstant les assurances de M. Carrier quant à l’indépendance de son équipe)?

Pour ceux qui répondent «Non» à une ou plusieurs de ces questions, ou ceux qui se sentent mal à l’aise avec une telle éventualité, nous devons se demander : «Et maintenant?».

C’est une question à multiples facettes à laquelle chacun de nous doit répondre.

Sachez, par contre, que les citoyens peuvent avoir un impact!

Dans un premier temps, parlez-en à vos amis et voisins. Plus les gens sont conscients des enjeux, mieux c’est.

Étant donné que cette lettre est si longue, je vais la conclure et reporter toutes autres analyses et commentaires à une date ultérieure.

Mes remerciements aux lecteurs qui ont eu la patience et l’endurance pour me lire jusqu’au bout.

Marc Lapierre, citoyen de Drummondville

 

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