Le courageux art de bloquer des lancers

Le courageux art de bloquer des lancers
Kaylen Gauthier retire une grande fierté de son jeu défensif et plus particulièrement des tirs qu'il parvient à bloquer. (Photo : archives, Ghyslain Bergeron)

MAGAZINE. À la base, le hockey est un sport exigeant une certaine dose de courage. Se tenir en équilibre sur deux lames sur une surface glacée où des adversaires filant à toute allure tentent de vous mettre en échec requiert certes du sang-froid. Mais rien ne nécessite plus de cran que de se placer devant un tir foudroyant dans l’espoir de bloquer une rondelle.

Chez les Voltigeurs de Drummondville, Kaylen Gauthier et Orlando Mainolfi font partie de ces spécialistes de la défensive qui n’hésitent pas à sacrifier leur corps pour la cause de l’équipe. Les deux vétérans défenseurs, qui forment le duo le plus efficace de l’équipe cette saison, retirent une grande fierté de cet aspect de leur jeu.

«Tous les joueurs ont des rôles différents, explique Gauthier. C’est ce qui fait le succès d’une équipe. Certains défenseurs ont un rôle plus offensif. Orie et moi, notre rôle, c’est vraiment de limiter les chances de l’adversaire. Bloquer un tir, c’est une façon de le faire. Entre nous deux, on se challenge. C’est une petite compétition à l’interne qui nous pousse à nous sacrifier pour l’équipe.»

Orlando Mainolfi est devenu un véritable spécialiste des lancers bloqués. (Photo d’archives, Ghyslain Bergeron)

«Comme spectateur dans les estrades, on ne réalise pas toujours les conséquences d’un lancer bloqué sur le coup. Vu qu’il a été bloqué, la menace s’arrête là. Mais si la rondelle n’avait pas été bloquée, qu’est-ce qui serait arrivé? On a peut-être sauvé un but ou une chance de marquer. Pour nous, c’est vraiment une fierté de voir qu’on peut faire une différence dans une partie», poursuit le Drummondvillois de 18 ans, qui s’est initié à l’art de bloquer des tirs par l’entremise des entraîneurs des Sénateurs du Collège Saint-Bernard, dans le circuit préparatoire scolaire.

Sur le banc, on aperçoit souvent les joueurs réagir vivement lorsqu’un coéquipier bloque un lancer. Parfois en douleur, celui qui s’est sacrifié pour la cause est accueilli en héros à son retour au bercail.

«Ça fait mal. Ce n’est pas agréable, mais on le fait pour le bien de l’équipe. Ça amène aussi un certain momentum dans le match. Si tout le monde se sacrifie pour la cause, ça peut contribuer aux succès de l’équipe», expose Gauthier.

«Les gars respectent les petites choses qui apportent de l’énergie dans un match, que ce soit distribuer des mises en échec ou bloquer des lancers», renchérit Mainolfi, qui s’est fait un nom à travers le circuit Courteau comme un véritable expert en la matière.

Une question de volonté

Les deux casse-cous des Voltigeurs assurent ne pas être effrayés par les risques de blessures. «Si on s’arrêtait à ça, on ne serait pas dans le bon sport. Le hockey, c’est un jeu qui demande des sacrifices. On est prêt à vivre avec les conséquences. On le fait dans l’intérêt de l’équipe. Si on n’est pas prêt à le faire, je ne pense pas qu’on mérite de jouer dans la LHJMQ», soutient Gauthier.

«Je me suis déjà fait mal en bloquant un tir, mais je ne suis jamais blessé, ajoute son partenaire ontarien de 20 ans. Jouer avec de la douleur, c’est une chose, mais jouer avec une blessure, c’est autre chose.»

Chez les Voltigeurs, l’entraîneur-chef Steve Hartley est un ardent défenseur de cette mentalité. «Steve veut une équipe qui est difficile à affronter et qui prend soin de son territoire. Bloquer des rondelles, ça fait partie de cette identité. Moins tu accordes de lancers à l’adversaire, plus tu as de chances de l’emporter», fait valoir Gauthier.

Aux yeux des deux leaders des Voltigeurs, bloquer une rondelle s’avère davantage une question de volonté que de technique.

Kaylen Gauthier. (Photo d’archives, Jonathan Roy/LHJMQ)

«Selon moi, tu l’as ou tu ne l’as pas. Si tu veux vraiment bloquer un lancer, tu vas le faire. Sinon, tu ne le bloqueras pas. Tu vas t’arranger pour t’éloigner au lieu de te placer devant la rondelle. C’est juste une question de volonté et de sacrifice. Si tu n’es pas prêt à faire ça pour ton équipe, je pense que tu n’es pas dans le bon sport», affirme Mainolfi.

Néanmoins, les spécialistes des tirs bloqués doivent porter attention à leur positionnement afin éviter de voiler la vue de leur gardien… ou encore pire, de faire dévier la rondelle dans le fond du filet.

«C’est une question d’angles, précise Gauthier. Dans notre équipe, on essaie de limiter les lancers du côté extérieur du filet. On s’est entendu pour laisser le côté rapproché au gardien de but.»

Plus jeune, Kaylen Gauthier avait pour idole son père. Au cours de sa carrière de 13 saisons dans les rangs professionnels, Denis Gauthier s’est établi comme un arrière à caractère défensif.

«Ça fait vraiment partie de mon ADN. J’ai grandi en voyant mon père jouer. Bloquer des lancers, ça faisait partie de son travail. J’essaie de reproduire ce qu’il faisait», raconte Kaylen, qui est aujourd’hui dirigé par Denis chez les Voltigeurs.

Parmi les conseils que son père lui a refilés au fil des ans, il y en a un en particulier qui lui revient souvent en tête. «Il m’a déjà dit que quand tu as mal, mais que c’est loin du cœur, ce n’est pas si grave que ça. Quand tu bloques un lancer avec ta cheville ou ton poignet, ça fait mal, mais c’est encore loin du cœur. Tu peux donc continuer à jouer.»

Gauthier et Mainolfi militent par ailleurs pour que les statistiques des lancers bloqués soient comptabilisées sur le site officiel de la Ligue de hockey junior majeur du Québec, comme c’est le cas dans la Ligue nationale.

«Pour les joueurs plus défensifs, la colonne des points n’est pas nécessairement la plus intéressante. Pour savoir si on a joué un bon match, on va se baser sur le différentiel ou sur les mises en échec. Si on peut ajouter les lancers bloqués à ces statistiques, ce serait intéressant. Pour les recruteurs ou même les partisans qui s’intéressent aux joueurs plus défensifs, ça pourrait être un bel ajout», termine Kaylen Gauthier.

Partager cet article