L’agriculture sous le regard de Richard Ibghy et Marilou Lemmens

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Par Emmanuelle LeBlond
L’agriculture sous le regard de Richard Ibghy et Marilou Lemmens
Marilou Lemmens et Richard Ibghy. (Photo : gracieuseté)

ARTS VISUELS. Environnement, politique, histoire et finance. Les artistes Richard Ibghy et Marilou Lemmens se sont intéressés à l’agriculture québécoise, en analysant le sujet sous plusieurs angles. L’exposition Querelle entre deux puces pour savoir à qui appartient le chien sur lequel elles vivent dévoile le fruit de leurs recherches, présenté à la Fondation Grantham pour l’art et l’environnement.

Les artistes de Durham-Sud sont les premiers lauréats couronnés par la Fondation Grantham pour l’art et l’environnement. «Nous voulons d’abord appuyer les artistes qui s’intéressent aux arts visuels en lien avec les enjeux environnementaux. Dans ce contexte-là, la Fondation lance un appel à projets. Les artistes déposent des dossiers. Il y a des appels à projets pour les artistes et il y a un autre pour les chercheurs», explique le cofondateur Bernard Landriault. Les demandes sont évaluées et analysées par un comité scientifique.

À la suite d’une réponse positive, Richard Ibghy et Marilou Lemmens ont été invités à réaliser une résidence de création à même la galerie. «C’est quelque chose qu’on essaie de faire autant que possible. On essaie toujours de passer de grandes périodes dans les lieux d’exposition avant de monter une exposition. On trouve que ça change la façon dont les œuvres vont habiter l’espace. Ça nous permet de concevoir des dispositifs de présentation qui sont adaptés au lieu», soutient Marilou Lemmens.

La maison est située à Saint-Edmond-de-Grantham. (Photo: archives)

Le duo était particulièrement enthousiaste à l’idée de développer des œuvres dans leur région. «Comme artiste, on travaille souvent à l’étranger et dans le reste du Canada. C’est une opportunité assez exceptionnelle de pouvoir travailler avec la Fondation qui est située à 30 minutes de chez nous. On a pu se poser des questions sur notre habitat et notre écologie.»

La terre

Le territoire est un thème qui se trouve au cœur de l’exposition. «On habite dans une région rurale depuis dix ans. Dans les cinq dernières années, on a commencé à s’intéresser par ce qu’il se passe autour de nous. On a voulu se pencher sur tout ce qui se passe dans un contexte rural, non seulement au Centre-du-Québec, mais plus largement au Québec. Quels sont les processus écologiques importants qui impliquent à la fois des humains et des non humains? L’agriculture s’est imposée comme une des façons qu’on habite le territoire et qu’on équilibre le territoire», indique Marilou Lemmens.

Durant la résidence, les Durhamiens ont rencontré des chercheurs et des agriculteurs. Ils ont aussi collecté des données, tout en analysant des cartographies sur les transformations récentes de nos rapports au sol.

Six créations ont vu le jour. «Chaque œuvre apporte son élément pour former quelque chose qui traite d’un sujet, où il y a un lien qui se tisse entre les œuvres.»

Les rivières

L’inhospitalité de douze rivières est une œuvre marquante aux yeux de Marilou Lemmens. «Durant la résidence, on a passé le mois de juillet à la Fondation. Il y a une rivière juste devant l’édifice. On est allé plusieurs fois marcher avec des bottes de caoutchouc dans la rivière parce que l’eau n’était pas trop haute. On a découvert le monde des organismes benthiques, c’est-à-dire des écrevisses, larves, libellules, nématodes et vers», raconte-t-elle.

Le duo a eu un déclic. «D’abord, on se posait des questions sur la santé de la rivière. Ensuite, ça nous a amenés à nous intéresser à la santé des rivières dans les milieux agricoles pour faire une œuvre.» Après plusieurs discussions avec des spécialistes, Richard Ibghy et Marilou Lemmens ont effectué leur propre échantillonnage d’eau.

Le résultat de leur récolte figure dans l’exposition. Le niveau de toxicité de différents milieux aquatiques est représenté par un système de classement.

Pédagogie

La pédagogie a une place particulière dans l’exposition. «Il y a une relation à l’information dans nos œuvres», affirme Marilou Lemmens. Pour l’œuvre L’affaire Louis Robert, les artistes ont réalisé une sculpture qui matérialise les résultats de l’enquête sur la productivité de 64 champs de maïs. Un bâton représente la productivité des semences traitées avec des pesticides et l’autre, non traitées.

L’oeuvre « L’affaire Louis Robert ». (Photo: gracieuseté)

«L’information n’est plus seulement en 2D sur un graphique, sur une page. Tout d’un coup, il y a une capacité que l’information puisse affecter le visiteur. Il y a un côté pédagogique qui se joue au niveau affectif, mais aussi au niveau rationnel», précise l’artiste.

Lors des prochains mois, environ 300 élèves du primaire, du secondaire et du Cégep de Drummondville bénéficieront de l’exposition.

Querelle entre deux puces pour savoir à qui appartient le chien sur lequel elles vivent est disponible jusqu’au 29 novembre, du jeudi au dimanche, de 11 h à 17 h. Pour les intéressés, il est important de réserver avant de se déplacer.

La Fondation Grantham pour l’art et l’environnement est située à Saint-Edmond-de-Grantham.

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