Une nouvelle piste cyclable qui n’est pas la bienvenue

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Par Marilyne Demers
Une nouvelle piste cyclable qui n’est pas la bienvenue
Hélène Lamothe est l’instigatrice de la pétition contre les nouvelles bandes cyclables prévues sur la rue Lalemant, à Drummondville. (Photo : Ghyslain Bergeron)

MOBILITÉ DURABLE. Au moment où la Ville de Drummondville met en place les premières actions découlant de son plan de mobilité durable 2020-2040, des citoyens lui ont remis une pétition contre les nouvelles bandes cyclables projetées sur la rue Lalemant, en face de chez eux.

Les marquages au sol pour ce nouveau lien cyclable se feront sur 720 mètres d’asphalte, ce qui est loin de faire l’unanimité auprès des résidents du secteur. Lundi, une pétition de 89 signatures a été déposée aux élus, leur demandant de faire marche arrière.

Les signataires estiment que l’ajout d’une piste cyclable sur la rue Lalemant représente un danger pour les cyclistes. «L’étroitesse de la rue est un facteur important. En 2015, ils ont déjà rapetissé la largeur de la rue. En ajoutant les pistes cyclables, il reste 19 pieds [5,8 mètres]. Il y a des autobus et des camions cubes qui passent et ils font plus de 10 pieds [3 mètres] de largeur. Ce n’est pas sécuritaire», clame Hélène Lamothe, l’instigatrice de la pétition, qui dit avoir recueilli d’autres signatures depuis lundi.

La rue Lalemant, à Drummondville. (Photo: Ghyslain Bergeron)

La largeur de la chaussée de la rue Lalemant est de 12,1 mètres. Actuellement, les voitures peuvent se stationner de chaque côté de celle-ci. Les cyclistes et les automobilistes se partagent 7,1 mètres, soit 3,55 mètres par direction.

Une fois le marquage au sol réalisé, le stationnement sera autorisé sur un seul côté de la rue. Selon le plan d’aménagement des travaux, avec cette modification, il sera possible de circuler sur 9,6 mètres de chaussée. Les voies de circulation pour les voitures passeront de 3,55 mètres à 3 mètres par direction. Les cyclistes auront quant à eux un corridor de 1,8 mètre par direction qui leur sera réservé.

«La largeur de la rue ne change pas, elle reste la même. Toutefois, avec le marquage, l’auto sera portée à rouler plus au centre parce qu’il va y avoir deux lignes qui vont lui dire où rouler dans la rue. Ce sera plus sécuritaire pour les cyclistes», soutient Clyde Crevier, surintendant à la circulation routière à la Ville de Drummondville.

Circulation

Selon Héléne Lamothe, 1 382 véhicules ont circulé sur la rue Lalemant lundi, entre 6 heures et midi. (Photo: Ghyslain Bergeron)

Hélène Lamothe se dit toutefois loin d’être rassurée. «Il y a beaucoup de circulation. On a les ateliers municipaux de la Ville, Canac et un nouveau développement résidentiel. En six heures, j’ai compté 1 382 véhicules lundi», indique-t-elle, ajoutant que la limite de vitesse n’est pas respectée par les automobilistes.

Sur la rue Lalemant, la vitesse permise est de 50 kilomètres/heure, de même qu’une section de 30 kilomètres/heure alors que les écoles l’Aquarelle et Saint-Simon sont situées à proximité. Lors des travaux de réfection réalisés il y a six ans, la largeur de la rue a été diminuée, l’objectif étant notamment de réduire la vitesse de circulation.

Si cette modification n’a pas eu l’effet escompté, la Ville estime que l’ajout des pistes cyclables sera plus bénéfique cette fois-ci, comme ce fut le cas sur la rue Notre-Dame.

Des comptages réalisés en 2017 avaient répertorié que le débit moyen est d’environ 2 000 véhicules par jour. «Les vitesses étaient au 85e centile pas si mal, 85 % des gens roulent en bas de 56 kilomètres/l’heure sur la rue Lalemant», indique Clyde Crevier.

Un nouveau relevé de circulation et de vitesse doit être réalisé prochainement.

Alternative

Comme alternative, Hélène Lamothe suggère de faire passer le trajet sur la rue Goupil, où une piste cyclable est déjà présente. «Sur la rue Goupil, c’est un but d’acheminement scolaire et non de mobilité active du point A au point B», explique le surintendant à la circulation routière, mentionnant que les cyclistes circulent déjà sur la rue Lalemant.

«On a choisi la rue Lalemant dans le réseau cyclable parce que c’est une locale principale. Elle se classe un peu plus haut dans la hiérarchie routière que les rues Jogues, Goupil ou Jean-de-Lalande. Ensuite, on sait qu’il y a un feu de circulation à l’intersection du boulevard Saint-Joseph. Ça permet la traversée de façon sécuritaire», poursuit-il.

«Sur le boulevard Lemire, il n’y a aucun feu de circulation actuellement, mais si on en avait un à mettre selon les normes et notre réseau routier, la recommandation serait de le positionner à l’intersection de la rue Lalemant. Il se retrouverait à 350 mètres du boulevard Jean-De Brébeuf et 500 mètres du réseau de la route verte.»

Cette année, Drummondville prévoit réaliser 6,6 kilomètres de nouveaux aménagements cyclables pour un montant de 10 500 $. En plus de la rue Lalemant, cinq secteurs sont concernés.

Dialogues

Autre mécontentement dans ce dossier, les résidents de la rue Lalemant estiment que les informations concernant la nouvelle piste cyclable leur sont parvenues trop tard. Le 8 juin dernier, ils ont reçu une lettre de la Ville de Drummondville datée du 3 juin, les informant des travaux. Au même moment, l’entrepreneur débutait le prémarquage. «On n’a pas été avisés avant que les travaux commencent», déplore Hélène Lamothe.

Une soirée d’information était prévue, mais elle a dû être annulée en raison de la pandémie de COVID-19. Vu le contexte, la lettre invitait les citoyens à consulter le projet en ligne ou à contacter par téléphone le service du développement et des relations avec le milieu de la Ville de Drummondville.

Yves Grondin, maire de Drummondville. (Photo: Ghyslain Bergeron)

«La possibilité de dialoguer et d’échanger était là et est encore là. C’est un défi constant qui est plus difficile parce qu’on ne peut pas le faire en personne à cause de la COVID-19, mais on entend ce que les gens disent», mentionne le maire de Drummondville, Yves Grondin.

Au cours des derniers jours, les résidents ont trouvé écho auprès du conseiller du district 4, Alain D’Auteuil. L’élu déplore la réalisation de la nouvelle piste cyclable malgré l’opposition. «Côté démocratique, on se demande si les gens sont suffisamment entendus. Avec la pétition, je pense que ce serait le temps», soutient-il.

Drummondville ira de l’avant avec le projet. Hélène Lamothe exige qu’une étude indépendante soit réalisée pour démontrer que la nouvelle piste cyclable sera bel et bien sécuritaire. La Ville assure qu’un suivi sera effectué.

«Il y a cette assurance de dire qu’on va continuer à analyser, voir comment ça se comporte, est-ce que la vitesse a baissé, est-ce que le débit est différent, est-ce qu’il y a d’autres mesures à prendre. Il y aura d’autres lectures qui vont se prendre. S’il y a à intervenir, on va intervenir. Ce n’est pas une décision cavalière», indique le maire Yves Grondin.

Drummondville, qui a adopté son premier plan de mobilité durable en septembre dernier, veut aménager une moyenne de 5 kilomètres de pistes cyclables par année. À ce rythme, ce sont 75 kilomètres de nouveaux aménagements cyclables qui s’ajouteront sur le territoire d’ici 2035.

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