Le nouvel univers des commerçants de soins personnels

Photo de Cynthia Martel
Par Cynthia Martel
Le nouvel univers des commerçants de soins personnels
Les commerçants ne lésineront pas sur les précautions à prendre pour préserver la sécurité et la santé de tous. *Photo prise avant la pandémie.* (Photo : Ghyslain Bergeron)

CORONAVIRUS. Pertes de revenus. Personnel réduit. Désinfection constante et méticuleuse. Protection complète. Voilà la nouvelle réalité des commerçants en soins personnels à l’ère du coronavirus.

Mercredi après-midi, le gouvernement du Québec a annoncé la réouverture des commerces en soins personnels dès le 1er juin. Une excellente nouvelle pour les propriétaires de ces entreprises et leur clientèle, laquelle se fera maintenant chouchouter dans une tout autre ambiance.

Michael Dubuc, propriétaire du salon Style M et artiste coiffeur. (Photo tirée de Facebook)

D’abord, ces commerçants ne lésineront pas sur les précautions à prendre pour préserver la sécurité et la santé de tous. À titre d’exemple, au Salon Style M, il y aura des plexiglas entre chaque poste, au lavabo et à la réception. Les clients, qui devront obligatoirement porter un masque, devront se désinfecter les mains avant d’entrer et n’auront pas à toucher la porte puisqu’une personne sera assignée à l’ouvrir.

«La salle d’attente ne sera pas accessible. Si les clientes arrivent d’avance, elles devront attendre dans leur véhicule. Elles ne devront pas être accompagnées aussi», ajoute Michael Dubuc, propriétaire du salon Style M et artiste coiffeur.

À la Reine de pique, boutique de tatouage et de perçage, si les normes d’asepsie, d’hygiène et de désinfection étaient déjà appliquées rigoureusement, les employés devront maintenant eux aussi se familiariser avec les masques et les visières.

Landy Bergeron, propriétaire et perceuse à La Reine de pique. *Photo prise avant la pandémie* (Photo gracieuseté)

«Je devrai aussi attitrer quelqu’un à la désinfection. Habituellement, c’est moi qui m’en occupais, mais là, faudra entre chaque client nettoyer aussi les poignées, la salle de bain et les comptoirs», indique Landy Bergeron, propriétaire et perçeuse.

Outre les mesures d’hygiène et d’entretien, il y a également toute la question de la distanciation physique, laquelle obligera les commerces à fonctionner avec un personnel réduit.

«On va réduire l’équipe de moitié. C’est la même chose au niveau de la clientèle. Il ne faut pas qu’il y ait un croisement ou plusieurs personnes en même temps. C’est une cliente à la fois», fait savoir Michael Dubuc.

«Maintenant, ce sera sur rendez-vous pour qu’il n’y ait pas plus que trois clients à la fois dans le magasin. Ça ne m’effraie pas, même que je crois que ce sera plus facile, car parfois, on avait de gros booms et ce n’était pas évident à gérer. Je pense que personne ne sera pénalisé», affirme Landy Bergeron.

La perte de clientèle est une préoccupation pour ces commerçants qui doivent déjà se casser la tête à rattraper les rendez-vous qui étaient prévus à l’agenda en mars et avril, alors que le téléphone ne dérougit pas depuis mercredi.

«Je suis obligé d’ouvrir deux jours de plus. Maintenant, je vais me retrouver à faire six jours semaine pour rattraper les mois qu’on a manqués, c’est-à-dire au moins 200 rendez-vous», laisse entendre M. Dubuc.

Marie-France Ménard, propriétaire du Salon Duo et coiffeuse maquilleuse. (Photo tirée de Facebook)

Pour sa part, Marie-France Ménard, propriétaire du Salon Duo, ne se cache pas pour dire que les pertes de revenus subies les dernières semaines continueront de s’accumuler.

«Nous avions plusieurs clients qu’on coiffait et maquillait pour des mariages, mais ils sont tous reportés à l’année prochaine. Ça nous enlève un gros revenu qu’on avait l’été, parce que toutes les fins de semaine y étaient consacrées.»

Cette pandémie engendre également des frais imprévus au budget.

«Ça va nous coûter beaucoup de frais au niveau sanitaire. Pour ma part, je n’aurai pas le choix d’augmenter les prix, comme sûrement la plupart des salons pour réussir à avoir un bon service avec autant de qualité et cette protection», croit le propriétaire du Salon Style M.

Celui-ci avoue être craintif pour le long terme.

«Combien de temps va-t-on pouvoir travailler comme ça? Au niveau des commerces, si tu réduis la quantité de salaires et de clientèle, c’est sûr qu’au niveau économique, ça va être plus difficile. Est-ce que ça peut engendrer des fermetures de salons ou des faillites?», soulève-t-il.

Somme toute, les trois entrepreneurs sont enthousiastes à reprendre le boulot et renouer avec leur clientèle.

«Je suis prête à repartir la machine! lance Marie-France Ménard. Pour de vrai, avec la pause qu’on a eue, on est contente de recommencer à travailler. C’est juste du positif. On s’ennuie de nos clients. Notre travail, c’est notre raison d’être.»

«Je suis très heureux de recommencer à travailler. Déjà, en salon, il faut désinfecter nos choses. C’était déjà en pratique. Pour moi, c’est de serrer la vis un petit peu plus et être plus à l’affût», se dit d’avis M. Dubuc.

«Je suis confiante. Nous ne sommes pas un besoin essentiel, mais on voit depuis hier que ça manquait aux gens. Ils aiment se gâter», estime Mme Bergeron.

Coiffer à la maison, un stress supplémentaire

De son côté, bien qu’elle soit bien équipée en masques et en produits désinfectants et que son environnement de travail a méticuleusement été nettoyé et désinfecté, la coiffeuse Carolanne Pépin, propriétaire du Studio Créa’tif, avoue ressentir un certain stress à recevoir à nouveau ses clients dans son salon, qui est situé au sous-sol de son domicile.

Carolanne Pépin, propriétaire du Studio Créa’tif. (Photo gracieuseté)

«Ça me fait peur! Ça fait huit semaines que je prends tous les moyens possibles pour protéger ma petite famille, donc de recevoir de la clientèle à la maison, oui ça met un petit stress de plus. Même si j’ai confiance en elle, il reste que si quelqu’un a des symptômes ou a été en contact avec une personne ayant la COVID-19, sera-t-il assez honnête pour le dire?», se questionne-t-elle.

Si le port du masque est non obligatoire pour les clients, Mme Pépin le rendra dans son salon à en offrant à ceux qui se présenteront le visage découvert.

«Je m’en suis procuré environ 300. De plus, à l’arrivée de chaque client, il sera impératif de procéder au lavage des mains avec une solution désinfectante qui sera mise à leur disposition. Il y en aura également sur le poste de travail. De mon côté, je me suis procuré une visière et des lunettes de protection et je me suis fait faire des masques artisanaux et des sarraus. Je vais être équipée comme si j’allais à la guerre!» explique-t-elle.

Évidemment, tout sera désinfecté entre chaque client, de la chaise à la salle de bain. Ce temps qu’elle alloue à ces tâches, elle ne l’aura pas pour certains clients qu’elle devra refuser.

«Ça demande beaucoup d’organisation et de temps, mais je veux tout faire pour protéger mes clients et bien sûr, ma petite famille», soutient-elle, soulignant qu’elle a somme toute hâte de retrouver sa clientèle.

(Avec la collaboration d’Emmanuelle Leblond)

Partager cet article