La simplicité volontaire, le choix d’une famille d’ici

La simplicité volontaire, le choix d’une famille d’ici
Jérémie Bouchard et Karine Milot-Durocher ont adopté un mode de vie simplicitaire en compagnie de leurs fils Thomas et Cédric. (Photo : Jonathan Habashi)

MAGAZINE. On dit qu’il existe autant de formes de simplicité volontaire que de gens qui la pratiquent. L’Express magazine est allé à la rencontre d’une famille drummondvilloise qui a choisi d’être à la fois simplicitaire, végane et zéro déchet.

En entrant dans la demeure de Karine et Jérémie, on peut apercevoir un cadre mettant en valeur une citation de Gandhi : «Sois le changement que tu veux voir dans le monde.» C’est sous ce principe que le couple et ses enfants, Thomas, 11 ans, et Cédric, 13 ans, tentent d’orienter leurs choix.

«Quand on parle de simplicité volontaire, les gens pensent qu’on habite dans une grotte et qu’on ne possède rien. On possède beaucoup de choses, mais on n’achète que si on en a besoin, explique Karine. On essaye de réparer ce qu’on a déjà. On fabrique beaucoup de choses nous-mêmes et on a tendance à récupérer ce que les autres veulent jeter. Tout notre mode de vie est basé sur des choix comme ceux-là. Pour nous, c’est tellement naturel de faire avec ce qu’on a.»

Misant sur le temps plutôt que sur l’argent, la famille ne mène pas un rythme de vie conventionnel. Ainsi, Jérémie est le seul à travailler. «Ça nous suffit, indique Karine, qui doit composer avec la sclérose en plaques. Ce sont tous des choix qu’on fait, mais derrière, il y a aussi le fait de prendre conscience qu’on n’a pas besoin de plus… et qu’on fonctionne très bien comme ça.»

«Je n’appellerais pas ça une simplicité volontaire, mais plutôt une consommation intelligente, renchérit Jérémie. On pense toujours à ce qu’on consomme. On se demande si on en a besoin. L’objectif, c’est de vivre bien, mais avec moins.»

Ainsi, presque tous les objets qui se retrouvent dans la maison sont usagés. Le sofa, la table de cuisine et le mobilier de la chambre sont des dons faits par des proches. Même le sapin de Noël allait prendre la direction du dépotoir avant de se voir offrir une seconde vie. «On réussit à faire avec ce que les gens nous donnent. Par exemple, nos fauteuils ont plus de 30 ans, mais ils font l’affaire. Je ne vois pas pourquoi je les changerais simplement pour suivre la tendance», raconte Karine, en précisant que la famille possède également peu de vêtements.

Zéro déchet et véganisme

Appuyant la cause environnementale et favorisant le commerce équitable, la famille a logiquement choisi de réduire ses déchets. Dans les armoires, on retrouve donc presque exclusivement des produits achetés en vrac. En plus de faire son propre pain, Karine fabrique également ses propres produits ménagers et de soins corporels. «On essaie d’avoir le moins d’emballage possible. Dans la cuisine, la poubelle peut durer six semaines. Notre bac noir, on pourrait le sortir une seule fois par année. Pour nous, ce n’est pas un effort. Je pense qu’on pourrait faire encore mieux, sans effort.»

Dans son atelier où il dispose de plusieurs outils, Jérémie s’amuse à réparer toutes sortes d’objets. «C’est choquant de jeter ce qui peut encore servir», explique l’homme de 40 ans, en précisant qu’il ne verse pas non plus dans l’accumulation compulsive.

Il y a quelques années, la famille a aussi fait le choix de devenir végétarienne, puis végane. Le sucre raffiné et l’alcool ont été bannis de leur alimentation. «On le fait d’abord pour l’environnement, mais c’est aussi une question d’éthique animale et de santé. Nos enfants ont vite embarqué, mais on ne leur a rien imposé. On les laisse prendre leurs propres décisions.»

«Pour nous, ce n’est pas un effort. C’est notre normalité. C’est certain qu’on ressent une différence, mais je trouve qu’on fait ce qu’on doit faire, rien de spécial. On n’a rien d’extraordinaire», insiste Karine.

Une vie rêvée en forêt

Possédant une roulotte, la famille s’adonne au camping en pleine forêt pendant ses vacances estivales. «Jérémie et moi, on rêve d’habiter dans un endroit reculé, mais on ne veut pas l’imposer à nos enfants. Ils ont une vie ici, ils vont à l’école et ils ont leurs amis. La roulotte nous permet d’avoir un pied dans notre vie rêvée et l’autre pied dans la vraie vie. Là-bas, on laisse tomber l’horaire. On se lève quand on se réveille, on mange quand on a faim et on se couche quand on est fatigués.»

En camping, pas de télévision, de cellulaire ni de wifi. La famille produit de l’électricité avec des panneaux solaires et pompe l’eau à la source. «On va chercher quelque chose de différent de la vie quotidienne, soutient Jérémie. On revient à la base. Comme on a moins de ressources, c’est là qu’on prend conscience qu’on en utilise beaucoup. On a une réserve énergétique : l’eau et l’électricité sont comptées. Quand on revient à la maison, on a encore des réflexes de notre vie en forêt. On fait plus attention.»

Ayant lancé le groupe Facebook «Retour aux sources» afin de partager des informations sur la simplicité volontaire, Karine répète souvent qu’acheter, c’est voter. «Si tu trouves ça terrible que des enfants travaillent en Chine, n’achète pas ces produits-là. Il faut que tes bottines suivent tes babines. Il faut agir en conséquence», affirme la femme de 36 ans.

À l’heure de l’urgence climatique, Karine et Jérémie ont-ils l’impression que les mentalités ne changent pas assez rapidement au Québec? «Ces dernières années, on est passé par plusieurs étapes, comme celles d’un deuil. On s’est sentis rejetés par nos amis. On a été choqués de voir que le changement fait peur aux gens. Ça vient nous toucher bien profond, mais avec le temps, on se dit qu’on ne peut en faire plus. On voudrait que ça aille plus vite, mais l’être humain est un animal qui est bien dans sa routine. Le changement se fait sur le long terme. On est conscients que notre réalité ne peut pas être celle de tout le monde, mais on sait que tout est possible : il suffit de faire les bons choix», conclut le couple.

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