Une dernière marche vers l’hôtel de ville pour Alexandre Cusson

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Par Marilyne Demers
Une dernière marche vers l’hôtel de ville pour Alexandre Cusson
Alexandre Cusson s’est rendu au travail pour une dernière fois vendredi. (Photo : Frédéric Côté)

POLITIQUE. Vous l’aurez remarqué, Alexandre Cusson est un grand marcheur. Bouquin ou cellulaire en main, il se déplace à pied, la plupart du temps. Vendredi était sa dernière journée dans les souliers du maire de Drummondville. L’Express l’a accompagné durant sa dernière marche vers l’hôtel de ville, qui aura été sa deuxième résidence au cours des six dernières années.

10h30. Alexandre Cusson nous attend à son lieu de domicile, dans le secteur Saint-Charles. Son horaire est réglé au quart de tour. «C’est une journée spéciale, confie-t-il dès les premières minutes. C’est ce soir que je suis sans emploi. J’ai regardé mon trousseau de clés tantôt et je me suis dit : ah oui, ça, c’est la clé que je vais laisser ce soir.»

Alexandre Cusson marche des dizaines de kilomètres par semaine. Si on se fie au nombre de livres qu’il a perdu depuis 2017, on peut facilement croire que ses souliers sont bien usés. Et même si sa campagne le mènera aux quatre coins de la province au cours des prochains mois, l’aspirant candidat à la chefferie du Parti libéral du Québec (PLQ) n’a pas l’intention de laisser ses bonnes habitudes dans la Capitale du développement.

«C’est sur que je vais devoir garder un équilibre. J’ai dit à la responsable de mon agenda durant la campagne que c’était essentiel pour moi d’avoir du temps durant ma journée pour marcher et prendre l’air. Ça peut être un déplacement entre deux rencontres, tôt le matin ou tard le soir», fait-il savoir.

S’il a offert ses anciens vêtements – aujourd’hui trop grands – au vestiaire Saint-Pierre, il va de soi qu’il n’a pas l’intention de faire marche arrière. «Ce n’est pas une option. Et si jamais ça se produit, je m’achèterai de nouveaux vêtements. Ça sera ma punition», dit-il, blagueur.

La lecture. Malgré son horaire occupé, Alexandre Cusson dévore – au minimum – un livre par semaine. Biographies politiques et sportives, ouvrages québécois ou romans. Présentement, le livre Robert Bourassa et nous, écrit par Marie Gregoire et Pierre Gince, se trouve sur sa table de chevet. «Quel hasard!», sourit-il.

10h35. On traverse le vieux pont. Un piéton nous dépasse. Il pose une main sur l’épaule du maire. «Je suis très déçu de vous perdre comme maire. Bon succès!», lui dit-il. Alexandre Cusson le remercie, ajoutant qu’il a une belle couleur de manteau – lequel est rouge – avant de le laisser reprendre son chemin. Et lui, portera-t-il davantage la cravate rouge? «Je n’ai pas pensé à ça», lance-t-il.

(Photo : Frédéric Côté)

C’est un secret de polichinelle. Alexandre Cusson a été approché par des partis politiques, notamment celui du premier ministre du Canada, Justin Trudeau. Après mûres réflexions, le maire avait fait savoir, il y a presque un an, qu’il ne se lancerait pas en politique fédérale. Environ dix mois plus tard, il annonçait sa candidature à la chefferie du PLQ.

«Moi, je fais de la politique de proximité. Au provincial, l’impact est aussi immédiat. Ultimement, le fédéral est encore plus loin des gens. Je carbure davantage à ce qui change la vie du monde. Il y a souvent, aussi, une question du moment durant lequel ça se présente», indique-t-il.

«Le mandat à la mairie était à peine commencé au début de la dernière campagne provinciale, ça aurait donc été plus difficile. 2019 était une année durant laquelle je me consacrais aux négociations du pacte fiscal, ce qui a influencé ma décision. Je ne voulais pas abandonner mon monde, on y travaillait depuis deux ans. Je voulais me rendre au bout de ce projet, qui change la donne à moyen et long terme pour l’ensemble des municipalités du Québec. Si on ne l’avait pas réglé, je ne sais pas si ma décision aurait été la même. Pour moi, c’était important de livrer ce que j’avais commencé», poursuit-il.

Alexandre Cusson affronte Dominique Anglade, sa seule rivale déclarée à ce jour. Son entrée sur la scène provinciale ne se fera toutefois pas sans critique. «La politique partisane, ça vient avec des défis. C’est de se dire que ce ne sont pas des attaques personnelles. Parfois, il y a tellement d’histoires derrière les prises de position. Il faut se rappeler qu’on doit le faire pour les bonnes raisons. Moi, c’est ce que je me répète tous les jours», mentionne-t-il.

S’il sort gagnant en mai, gardera-t-il un pied à terre à Drummondville? «Je vais voir ce qui va se présenter dans ma vie. Je suis né Drummondvillois et je vais mourir Drummondvillois. Du moment où tu travailles à Québec, ça te prend un pied à terre. J’aurai des choix à faire.»

(Photo : Frédéric Côté)

10h45. On passe devant le parc Saint-Frédéric. Son endroit préféré à Drummondville. «C’est une place où les gens se rassemblent. Dans les villes européennes, on retrouve souvent des endroits comme celui-là», avance-t-il.

L’Europe. Les voyages. Pas ceux tout inclus, ceux durant lesquels il peut se déplacer à pied, librement, pour s’imprégner de la culture locale. Son passeport n’étant jamais bien loin, Alexandre Cusson a visité pas moins de…  83 pays.

«Ma façon à moi de décrocher, c’est de partir. J’aime l’histoire, la vie quotidienne, lire, m’arrêter dans des cafés. Quand je vais dans une capitale, évidemment, je cherche le parlement, et si je peux, je vais le visiter.»

Parmi les pays qu’il a visités, il adore particulièrement la Pologne. Berlin, Paris et Sidney font partie de ses villes coups de cœur. «Ça dépend toujours de ton état d’esprit, de ce que tu as besoin au moment où tu pars», soutient-il.

11h. On arrive à l’hôtel de ville. Tel-Aviv, sur la côte méditerranéenne d’Israël, pourrait être sa prochaine destination. «Je ne dis pas que ça va arriver dans la prochaine année, mais ça va arriver.»

D’ici là, Alexandre Cusson sillonnera la province pour convaincre les électeurs qu’il constitue la meilleure personne pour les représenter. Sa tournée débute en Gaspésie. Le PLQ désignera son nouveau chef lors du congrès à la direction les 30 et 31 mai, à Québec.


Des questions en rafale

  • Le dossier auquel vous avez consacré le plus d’heures? [30 secondes de réflexion] Le site d’enfouissement.
  • Le dossier que vous auriez aimé mener à terme avant votre départ : La Fortissimo.
  • Avez-vous l’impression, à certaines occasions, d’avoir outrepassé votre rôle de maire, ayant même l’impression d’avoir agi comme ministre du Centre-du-Québec par manque d’appuis? Le maire d’une capitale régionale a la responsabilité de faire avancer les dossiers. C’est certain qu’en étant longtemps dans l’opposition, ça demande aux élus municipaux une plus grande présence.
  • Si c’était à refaire, est-ce que vous réappliqueriez le règlement visant à réduire les interventions des citoyens lors de la période de questions des séances du conseil municipal? On n’a pas fait de règlement pour réduire les interventions des citoyens. On l’a fait pour structurer et pour donner du temps pour respecter le règlement. Donc oui, parce qu’on n’a pas réduit le temps. Au contraire, il y a un temps limite, mais on ne l’applique à peu près jamais.
  • Est-ce que vous avez suffisamment mis de l’avant les conseillers municipaux? Je pense que oui. Je pense que l’on connaît davantage nos conseillers municipaux maintenant qu’on les connaissait il y a six ans. Je l’ai fait en créant des délégations et en faisant en sorte qu’un élu, par exemple, porte un dossier. Les conseillers municipaux sont présents dans les comités, dans les conférences de presse, etc.
  • Qu’est-ce qui vous définit le mieux : êtes-vous carriériste, idéaliste ou pragmatique? Pragmatique.
  • Est-ce qu’un maire doit tout contrôler? Un maire a la responsabilité de l’administration de la ville. C’est le premier répondant, mais il doit surtout faire confiance aux gens qui l’entourent.
  • Qu’allez-vous faire si vous n’êtes pas élus au terme de la course à la chefferie du PLQ? Je ne me suis pas engagé avec un plan B. Il y a un seul plan possible.
  • Qu’est-ce qui attire votre sympathie, et à l’inverse, votre fougue? Ce qui attire ma sympathie, ce sont les gens qui sont vrais. Les gens qui disent des choses parce qu’ils ont une intention réelle de faire avancer un dossier. Ce qui attire ma fougue, ce sont les affirmations gratuites et les gens qui prêtent des intentions.
  • Quel est votre modèle politique? C’est toute une question! Je pense que pour être meilleur, il faut prendre ce qui est bon chez chacun. S’il fallait que je dise un seul nom, je dirais Jean Lesage.
  • Est-ce qu’il y a un départ, une démission ou un décès qui vous a davantage attristé au cours des dernières années? Le décès de mon grand ami Jacques Parr avec qui je travaillais au Collège Saint-Bernard et avec qui j’avais l’habitude de faire des voyages. Ce fut une grosse perte dans ma vie.
  • En terminant, Mathieu Audet ou Alain Carrier? [Rires] Je ne me prononcerai pas. Je n’ai pas l’intention de me mêler de la course, ni de près, ni de loin. Mais je vais aller voter!
(Photo : Frédéric Côté)
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