«Ça leur fait vivre des réussites autrement» -Céline Théoret, coordonnatrice de La Rue’L

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Par Cynthia Martel
«Ça leur fait vivre des réussites autrement» -Céline Théoret, coordonnatrice de La Rue’L
Caroline Boislard, intervenante à La Rue’L et Céline Théoret, coordonnatrice. (Photo : Cynthia Giguère-Martel)

ÉDUCATION. À Drummondville, l’école La Rue’L offre une alternative de scolarisation aux jeunes adultes de 17 à 30 ans vivant des difficultés depuis maintenant 11 ans.

Une quinzaine d’élèves fréquentent actuellement La Rue’L, un volet de l’organisme Le Refuge la piaule situé sur la rue Dorion, à Drummondville.

Si La Rue’L n’est pas associée à l’Alliance des milieux alternatifs de scolarisation du Québec (AMASQ), mais fait plutôt partie du Regroupement des écoles de rue accréditées du Québec, le principe est le même que les autres milieux alternatifs de scolarisation : offrir un programme de formation adapté aux besoins des jeunes ciblés afin de les aider à reprendre leurs études secondaires et faciliter leur intégration dans un centre d’éducation des adultes.

«Nous avons comme objectif d’aider ces jeunes adultes à se remettre en action, fait savoir Céline Théoret, coordonnatrice de La Rue’L. De plus, le fait qu’on soit dans un organisme ayant comme mission le travail de rue, on adopte une approche de réduction des méfaits. Il y a donc toute une équipe de soins qui entourent les jeunes (infirmière, travailleur social, intervenant en toxicomanie et médecin). On essaie ainsi d’élargir leur filet de sécurité.»

Le programme de l’école est soutenu par la Commission scolaire des Chênes et le Centre local d’emploi de Drummondville. Il est également reconnu par le ministère de l’Éducation.

Une journée typique commence à 11 h 15 avec un dîner servi par l’organisme. Suivent les travaux de français et de mathématiques. À 15 h, l’élève choisit entre poursuivre son travail et suivre un atelier (tricot, kickboxing, cuisines collectives, prendre soin de soi, etc.). Puis, la journée se termine par trente minutes de lecture.

«On leur propose aussi chaque mois des conférences traitant de sujets en lien avec leurs intérêts. De plus, différents partenariats nous permettent d’offrir des activités parascolaires, telles que spectacle à la Maison des arts, match des Voltigeurs et sortie au Village hanté. Les jeunes y participent sur une base volontaire. Ces activités et les ateliers facilitent leur intégration et leur font vivre des réussites autrement», indique Mme Théoret.

Caroline Boislard, intervenante, est une personne-clé dans la démarche de chacun des jeunes.

«Une fois par mois, je fais une rencontre de suivi avec le jeune. Souvent, ça me permet d’aller plus loin, c’est-à-dire, l’outiller et le guider pour certains aspects de sa vie personnelle. Ça m’arrive même d’en accompagner à un premier rendez-vous médical ou chez le dentiste, par exemple», explique-t-elle.

La plupart de la clientèle est sur l’aide sociale, mais est admissible au programme d’aide et d’accompagnement social Action du gouvernement du Québec. Les jeunes obtiennent ainsi une compensation mensuelle et le remboursement de leurs frais de déplacement et de garde, si besoin est. Les fournitures scolaires sont aussi couvertes.

Soulignons en terminant que la classe a été réaménagée à l’automne dernier pour la rendre davantage flexible. Ainsi, les jeunes peuvent, s’ils le souhaitent, travailler debout, assis sur un divan ou encore sur une chaise à roulettes.

«Ça aide à les responsabiliser. L’idée est que chacun trouve sa place pour réussir à se concentrer», conclut la coordonnatrice, qui note de belles réussites depuis les dernières années et des cheminements remarquables.

Témoignages

L’Express s’est entretenu avec quelques élèves. Voici certains commentaires retenus.

«Il y a deux ans, ma sœur est décédée. J’avais alors perdu mon intérêt pour l’école. Maintenant, je veux absolument finir mon secondaire pour aller ensuite en art dramatique (…) Ce que j’aime ici, c’est qu’on a un suivi constant et personnalisé.» -Jean-François Ricard

«En ce moment, je passe le plus de temps de ma vie dans une classe que je l’ai déjà été. C’est l’fun parce qu’on peut y aller à notre rythme, ici. Moi je n’avançais pas assez vite aux adultes, alors j’ai été mis dehors. Si tu ne réussis pas à suivre le parcours scolaire ordinaire, le gouvernement va quasiment te laisser-là. Le système est mal fait. Je trouve qu’il n’y en a pas assez des organismes comme La Rue’L.» -Cédric

«J’ai décidé de venir ici, parce que je veux être fière de moi et sentir que je fais de quoi d’utile et que j’avance. Je ne veux pas avoir 30 ans et être encore là. En venant ici, on est sûrement moins porté à vivre des échecs vu que justement, c’est adapté (…) J’aime que le personnel soit compréhensif.» -Gabrielle Bouthillette-Proulx

«Je suis déjà venue ici, j’ai arrêté et je suis revenue en septembre. Je n’étais pas capable de rester dans une école où il y a beaucoup de monde, ici, c’est un petit groupe et on fait des liens tranquillement. C’est familial et on est plus à l’aise, je trouve. Aussi, on peut régler d’autres problèmes en même temps, on a le soutien nécessaire et on peut parler avec l’intervenante quand on en a besoin (…) En plus, j’ai trouvé ce que je veux faire : une technique en éducation spécialisée. Ça me donne la motivation de continuer.» -Malorie

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