La Forêt Drummond, la grande oubliée de la tempête automnale

Photo de Cynthia Martel
Par Cynthia Martel
La Forêt Drummond, la grande oubliée de la tempête automnale
Au lendemain du 1er novembre, les sentiers de la Forêt Drummond n'étaient pas sécuritaires en raison de nombreux débris d’arbres et que certains menacent de tomber. (Photo : Archives - Lise Tremblay)

FORÊT. Arbres cassés et déracinés, branches brisées, sentiers impraticables. La Forêt Drummond est la grande oubliée de la tempête automnale qui a frappé le Québec le 1er novembre dernier.

C’est en parcourant les sentiers de la Forêt Drummond que L’Express a pris connaissance avec stupéfaction du piteux état de centaines d’arbres. Si plusieurs jonchent déjà le sol, d’autres, affaiblis par les vents violents, menacent de tomber compromettant ainsi la sécurité des usagers.

Aucune information traitant de la gravité des dégâts n’a été transmise aux médias, sinon qu’un communiqué laconique d’à peine neuf lignes envoyé le 4 novembre par Réseaux plein air Drummond. On y avisait notamment les citoyens de ne pas fréquenter la route verte, qui traverse entre autres la Forêt Drummond, étant donné que la saison est terminée. Un peu plus loin, on y indiquait que les pistes cyclables ne sont «pas sécurisées, des arbres peuvent être déjà tombés ou avoir été affaiblis par la tempête».

Sur le terrain, les autorités ont néanmoins mis rapidement des banderoles de signalisation pour délimiter les zones plus à risque. Mais celles-ci n’empêchant pas les piétons de s’y aventurer du côté du parc du Sanctuaire, la Municipalité de Saint-Majorique-de-Grantham a été dans l’obligation d’installer une immense pancarte de mise en garde sur laquelle on peut lire : «Sentiers fermés. À la suite des conditions climatiques extrêmes des derniers jours, nous vous informons que les sentiers au parc du Sanctuaire sont non praticables en raison des risques de chute de branches et d’arbres. L’accès aux sentiers est interdit jusqu’à nouvel ordre. Nous vous remercions pour votre collaboration.»

Avant la tempête, plusieurs arbres étaient déjà vulnérables, leurs racines ayant été fragilisées par un sol gorgé d’eau. (Photo Lise Tremblay)

Précisons que Saint-Majorique est propriétaire du parc du Sanctuaire, tandis que la MRC de Drummond gère environ 20 km carrés sur les 30 km carrés du couvert forestier de la Forêt Drummond. Réseaux plein air est mandataire de la portion située à Saint-Joachim-de-Courval, propriété de la Ville de Drummondville.

Pour l’instant, ni la Municipalité de Saint-Majorique ni la MRC de Drummond ne détient un plan d’action clair sur l’opération nettoyage. La raison étant fort simple, pour en avoir un, ils doivent faire appel à un conseiller forestier référé par l’Agence forestière des Bois-Francs. Celle-ci, via son programme d’aide à la mise en valeur des forêts privées, peut verser une subvention pour ce type de travaux sylvicoles.

«Nous n’avons pas d’ingénieur forestier au sein de notre équipe, donc les démarches ne peuvent pas être aussi rapides qu’on le souhaite. C’est ce qui fait aussi que nous ne connaissons pas encore l’ampleur des dégâts. Des discussions sont toutefois amorcées avec un conseiller forestier afin d’évaluer ce qui aura à faire. Oui, il y aura des travaux de nettoyage, mais on ne sait pas comment on va les faire, dans quelle séquence et à quel moment», explique Valérie Carrère, directrice de l’aménagement et des services techniques à la MRC de Drummond.

Les mêmes démarches ont été entreprises du côté de Saint-Majorique, selon la directrice générale, Émilie Trottier.

«Un conseiller forestier se déplacera éventuellement pour évaluer l’état des lieux.»

Même si elle n’a pas constaté par elle-même l’ampleur des ravages, Mme Carrère avance cependant qu’il sera impossible de nettoyer les 20 km carrés.

«On devra y aller par priorité et où la sécurité des citoyens est menacée (…)  C’est tellement exceptionnel comme situation, que ce n’est pas facile à gérer. Ça demande un peu plus de gestion et de planification», souligne-t-elle, rappelant aux usagers de respecter les interdictions de passage tout en étant doublement vigilants.

La récupération des arbres

Plusieurs arbres se retrouvent dans une fâcheuse position. (Photo Lise Tremblay)

Comme mentionné un peu plus haut, les autorités recevront une somme d’argent provenant de l’Agence forestière des Bois-Francs afin de mener à bien les opérations de nettoyage. Selon ce qui sera proposé par le conseiller forestier en ce qui a trait à la coupe de récupération, un montant sera alloué. Par exemple, si la coupe partielle manuelle est privilégiée, le producteur forestier (ici la MRC ou la Municipalité), recevra 1315 $ / hectare.

«Sur cette somme, 436 $ sont prévus pour les services professionnels et 879 $ serviront aux opérations sylvicoles exécutées entre autres par les bûcherons et les professionnels affairés à sortir le bois de la forêt», précise Guy Larochelle, directeur général de l’Agence forestière des Bois-Francs.

En guise de comparaison, l’aide allouée pour une coupe partielle mécanisée est de 1073 $ / hectare.

«Le montant est moins élevé, car la productivité de la machine est beaucoup plus grande qu’une scie mécanique.»

En revanche, 641 $ / hectare et 537 $ / hectare seront respectivement attribués pour la coupe totale manuelle et la coupe totale mécanisée.

En somme, l’aide financière couvre environ 80% des coûts techniques et d’exécution liés à la réalisation de travaux sylvicoles reconnus par l’Agence.

Si l’on assiste à un triste spectacle lorsqu’on s’aventure dans la forêt Drummond, on peut se rassurer en sachant qu’une quantité considérable de bois sera récupérable, selon M. Larochelle.

«Le beau côté de cette tempête, c’est qu’elle est arrivée juste avant le temps froid. Le bois pourra donc se préserver longtemps, contrairement si cet événement météo serait arrivé en plein mois de juillet à 30-35 degrés Celsius avec un haut taux d’humidité (…) Les risques de maladie causée par les insectes et les champignons sont pratiquement nuls en hiver», précise-t-il.

Mais le nettoyage ne sera pas pour autant une mince tâche, selon lui.

«Au dégel, le bois commence à se dégrader. On est quand même limité dans le temps, considérant qu’avant que le plan d’action ne se mette en branle, quelques semaines s’écouleront. D’un autre côté, il va falloir que ça opère, car l’accès de beaucoup de monde sera brimé sinon», expose-t-il.

La pénurie de main-d’œuvre est une autre réalité avec laquelle les autorités auront à composer.

«Dans quelle mesure les producteurs forestiers vont-ils pouvoir peser sur le gaz? Même si l’Agence verse la subvention requise demain matin, mais qu’il n’y a pas de bûcheron disponible, rien ne pourra se mettre en action. Il s’agit d’un gros problème», laisse tomber M. Larochelle.

Décidément, la Forêt Drummond n’a pas fini de subir les conséquences de cette tempête automnale qui continue à faire jaser.

Autres textes à lire sur ce même sujet :

Partager cet article