Violence conjugale : elle n’échappe pas à la justice

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Par Frederic Marcoux
Violence conjugale : elle n’échappe pas à la justice
Isabelle St-Louis et son avocate Sarah Nathalie Marsolais. (Photo : Frédéric Marcoux)

Isabelle St-Louis, cette femme qui avait été déclarée coupable de harcèlement et de menace contre son ex-conjoint dans une histoire de violence conjugale, a été condamnée à 50 heures de travaux communautaires et à deux ans de probation.

Son ex-conjoint, Stéphane Léopold Lévesque, avait affirmé avoir reçu environ 1500 textos en deux mois de la part d’Isabelle St-Louis, alors qu’il l’avait quitté pour aller vivre chez sa tante à Saint-Félix-de-Kingsey. Les infractions se sont déroulées entre le 28 juillet et le 22 septembre 2016. Montrant que la violence conjugale n’a pas de sexe, l’histoire avait été médiatisée un peu partout au Québec.

Pendant près d’une heure, mercredi, au Palais de justice de Drummondville, Me Sarah Nathalie Marsolais a plaidé pour qu’un verdict d’absolution conditionnelle ou inconditionnelle soit prononcé pour sa cliente, laquelle avait été déclarée coupable le 17 septembre dernier. L’avocate a fait valoir qu’Isabelle St-Louis avait amplement souffert du traitement médiatique, selon elle, puisque «47 articles» et «18 émissions de télévision» ont été présentées dans les médias, tout au long des procédures judiciaires.

Un proche d’Isabelle St-Louis a essayé d’empêcher l’auteur de ces lignes de prendre la photo.

«Madame se victimise»

Lorsque son avocate lui a demandé de témoigner, Isabelle St-Louis a fait savoir à la juge Marie-Josée Ménard de la Cour du Québec qu’elle a particulièrement été écorchée publiquement. Sur le plan personnel, une photo d’elle prise en petite tenue a été publiée dans le Journal de Montréal. Au travail, elle a aussi perdu plusieurs contrats.

La dame âgée dans la quarantaine, qui réside à Saint-Rémi, a qualifié de «cirque» le traitement médiatique des médias à son endroit, mentionnant au passage que «les journalistes ne sont pas des êtres très intelligents». Isabelle St-Louis a souligné qu’elle «ne comprenait pas en quoi les textos étaient criminels», puisqu’elle s’adressait à l’homme qui a partagé près de 30 ans de sa vie. Elle a fait savoir qu’elle doutait de la véracité du nombre de 1500 textos, avant que la juge ne lui laisse entendre que le contexte ne changeait pas, puisque la «situation est démesurée, même si c’est 1200 textos», a rappelé la magistrate.

Isabelle St-Louis a argué qu’un casier judiciaire l’empêcherait de s’épanouir sur le plan professionnel. Elle avait commencé une formation de serrurier en 2015, en complétant 360 heures sur les 1990 de la formation. Un argumentaire rejeté du revers de la main par la juge Ménard.

Le procureur de la Couronne, Me Kevin Mailhiot, a lancé à la juge que «madame se victimise», selon lui, en insistant sur le fait que la version de la fautive n’était pas crédible et qu’elle n’éprouvait pas de regret.

Manipulation affective

La juge Marie-Josée Ménard a partagé une vision des faits similaire à celle du procureur. Le témoignage d’Isabelle St-Louis en cour a confirmé ce qu’elle avait noté en lisant le rapport présentenciel.

«Cette compréhension que j’ai du rapport s’est matérialisée ce matin. Je perçois que vous avez encore beaucoup d’animosité envers monsieur et que, selon vous, c’est vous la victime et que monsieur est le bourreau la majorité du temps», a-t-elle soulevé à l’endroit de St-Louis.

La magistrate a tranché en s’appuyant sur «l’intensité, la teneur des propos, le contexte et la manipulation affective» qui sont les éléments au cœur du harcèlement dans cette histoire de violence conjugale. Elle a également été catégorique, lorsqu’elle a rejeté l’argument de couverture médiatique.

Me Sarah Nathalie Marsolais en compagnie de sa cliente Isabelle St-Louis, en novembre dernier.

«Je ne suis pas certaine du tout que la médiatisation a eu les conséquences souhaitées pour vous, c’est-à-dire un grand effet de dissuasion, a évoqué la magistrate. Vous vous sentez plus comme une victime. L’argument de la médiatisation est une chose sur laquelle le tribunal ne peut pas accorder tout le poids que vous souhaitez, parce que ce n’est pas de mon pouvoir. Les auditions sont publiques et font partie du processus d’une société. Le processus judiciaire ne fonctionne pas en vase clos.»

En plus des 50 heures de travaux communautaires qu’elle devra effectuer dans un délai d’une année, Isabelle St-Louis sera sous probation pour deux ans. Elle ne pourra pas entrer en contact avec Stéphane Léopold Lévesque pendant cette période. Il lui sera interdit de posséder une arme à feu dans la prochaine décennie également.

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