Clouée à son lit à 16 h en raison d’un manque de préposés aux bénéficiaires

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Par Marilyne Demers
Clouée à son lit à 16 h en raison d’un manque de préposés aux bénéficiaires
Jacqueline Levasseur accompagnée de son petit-fils au CHSLD L'Accueil Bon-Conseil. (Photo : Gracieuseté)

SANTÉ. Une résidente du Centre d’hébergement et de soins de longue durée (CHSLD) L’Accueil Bon-Conseil a été clouée à son lit à 16h par un manque de préposés aux bénéficiaires. Sa famille déplore la situation et interpelle le gouvernement.

Samedi après-midi, vers 16h, un employé du CHSLD situé à Notre-Dame-du-Bon-Conseil informe Jacqueline Levasseur qu’elle doit vêtir sa jaquette. La femme de 87 ans apprend qu’elle ne sortira pas de son lit pour le reste de la journée, faute de personnel.

Conséquemment, la résidente doit manger son repas au lit. «À la place d’avoir un repas chaud, ils lui ont mentionné qu’ils allaient lui faire un sandwich avec des crudités et du fromage», raconte son fils Gilles Thomas, qui a été mis au fait de la situation par sa mère, le lendemain.

«On m’a dit que c’est normal, que ça peut arriver une à deux fois par semaine, selon le manque de personnel sur le plancher. Ils y vont par rotation», ajoute l’homme de 58 ans.

Situation d’exception

De son côté, le Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux de la Mauricie-et-du-Centre-du-Québec (CIUSSS MCQ) indique qu’il s’agit d’une situation d’exception.

Gilles Thomas estime que le manque criant de préposés aux bénéficiaires se fait sentir au CHSLD L’Accueil Bon-Conseil. (Photo Marilyne Demers)

«Il n’y a personne qui demeure au lit, même en cas de manque de personnel. La consigne, c’est de lever tous nos résidents et de respecter leur routine, précise la responsable des communications au CIUSSS MCQ, Geneviève Jauron. Ça arrive dans des situations exceptionnelles qu’une personne soit installée plus tôt au lit pour qu’elle puisse y prendre son repas.»

«Il y a certains résidents qui sont volontaires. Sinon on fonctionne sur rotation pour éviter que la situation soit répétitive pour un même résident», ajoute-t-elle.

Lorsqu’une telle situation survient, les soins du coucher sont offerts en soirée, aux alentours de 19h, comme c’est le cas normalement. «On est conscient que le manque de personnel a des impacts sur les services offerts et on met énormément d’énergie pour améliorer la situation. Reste que la pénurie de main-d’œuvre est une problématique qu’on rencontre», reconnaît la porte-parole du CIUSSS MCQ.

Face au manque de personnel, et ce dans tous types d’emplois confondus, le CIUSSS MCQ doit effectuer jusqu’à 1700 appels par semaine auprès de personnes ayant indiqué qu’elles n’étaient pas disponibles.

Changements exigés

Afin de faire renverser la vapeur, Gilles Thomas a entrepris des démarches. Il espère que des changements soient apportés afin d’offrir une meilleure qualité de vie à sa mère.

«Il faut que ça bouge. Ça ne se fait pas lui faire vivre ça. Elle a quand même 87 ans. Elle a travaillé toute sa vie. Elle a eu huit enfants. C’est très dur émotionnellement de la voir comme ça, confie-t-il. Ma mère est très lucide. Et même si elle ne l’était pas, elle n’a pas à vivre ça.»

Le Drummondvillois a fait parvenir un courriel à la ministre responsable des Aînés et des Proches aidants, Marguerite Blais, le 18 février.

Soins adéquats

L’état de santé de Jacqueline Levasseur l’a forcée à quitter la résidence privée pour aînés autonomes et semi-autonomes l’Ermitage, où elle demeurait depuis environ sept ans.

L’octogénaire s’est fracturé l’humérus, un os du bras, dû à une chute, en octobre. Elle a été admise à un lit en réadaptation fonctionnelle au Centre d’hébergement Frederick-George-Heriot. «Elle a été mise en convalescence. Les spécialistes l’ont évaluée. Ils ont envoyé des recommandations», indique Gilles Thomas.

Afin de recevoir les soins adéquats, elle a rejoint le CHSLD L’Accueil Bon-Conseil en début février. «S’habiller, se laver et même marcher, elle n’est plus capable de faire ça, fait savoir le fils. On m’a dit à plusieurs reprises que c’est de valeur, parce que ma mère a encore toute sa tête.»

Aussi blessée à sa jambe droite, Mme Levasseur doit marcher pour mieux guérir. «La physiothérapeute a indiqué que les préposés peuvent la faire marcher quand ils ont le temps, mais ils n’ont jamais le temps. Alors ma mère ne marche jamais. Elle va perdre son autonomie. Moi j’y vais souvent, je la fais marcher, mais je ne peux pas être là tous les jours. J’ai aussi ma vie privée», se désole-t-il.

Gilles Thomas espère que ses démarches porteront fruit afin que sa mère, de même que les autres résidents, bénéficient de services adéquats.

Remarquable

S’il dénonce la situation haut et fort, Gilles Thomas ne remet pas en doute le travail des proposés aux bénéficiaires. «On n’en veut pas au personnel. Ils ont toujours le sourire au visage, même quand ils terminent leur shift. C’est remarquable, soutient-il. C’est à la haute direction qu’il y a un manque, je pense. Tout est relié au manque de personnel.»

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