(Tribune libre) Des relations égalitaires entre les nations, est-ce possible?

(Tribune libre) Des relations égalitaires entre les nations, est-ce possible?
Tribune libre (Photo : (Depositphoto))

TRIBUNE LIBRE. Jusqu’où la nation canadienne et la nation québécoise sont-elles prêtes à aller pour favoriser des relations égalitaires avec les Premières Nations? Rappelons certaines dimensions stratégiques.

Les Premières Nations (PN) vivent respectivement sur des territoires ancestraux depuis des temps immémoriaux.

Historiquement, le gouvernement fédéral et le gouvernement du Québec ont légitimé leur autorité et leurs priorités socio-économiques auprès des PN en procédant par un usage dominateur du monopole des décisions et des allocations des ressources.

Dans le processus de sédentarisation, les PN furent restructurées pour être adaptées aux desseins du développement économique du Québec et du Canada.

La sédentarisation a relégué les chefs traditionnels des PN au rang de subalternes des agents des administrations fédérale et québécoise, ceux-ci décidant de tout et maîtrisant l’économie des communautés innues.

Les stratégies gouvernementales mises de l’avant par le passé ont fait glisser les territoires ancestraux des PN dans l’anonymat et, ce faisant, les ont privées de toute signification politique pertinente, notamment en ce qui a trait à l’autodétermination interne.

Le contenu d’un pouvoir légitime et partagé doit être précisé avec les PN.

L’autonomie gouvernementale des PN s’exerce à partir de leurs droits de s’administrer démocratiquement sur Nitassinan.

Un système politique fondé sur l’opposition des droits de la majorité et des droits des PN (la minorité) n’est pas un critère efficace pour consolider le leadership dans les relations de nation à nation.

Les relations de nation à nation avec les PN doivent être guidées par le principe d’égalité, celui du droit à la différence ainsi que par celui de l’accomplissement des devoirs respectifs.

La participation des PN à la gestion transparente des affaires publiques est cruciale pour atteindre l’efficacité socio-économique sur leurs territoires ancestraux.

Les efforts accrus doivent être faits pour surmonter la méconnaissance des valeurs, des significations culturelles particulières et des réalités sociopolitiques et économiques des PN.

Les institutions, les langues autochtones, les valeurs traditionnelles des PN constituent un patrimoine matériel et immatériel qu’il faut protéger et transmettre aux générations futures.

Les PN concourent, aussi, à l’enrichissement du patrimoine culturel national et mondial.

Les relations égalitaires de nation à nation avec les PN permettent l’établissement de modèles de société qui influent sur les mentalités et favorisent une reformulation du politique s’éloignant de la pensée unique prônée par la société dominante.

Les nouvelles pistes de collaboration doivent faire concourir les compétences traditionnelles autochtones et les savoirs modernes.

La mise en place de nouvelles politiques tenant compte des réalités culturelles des PN sont nécessaires pour résoudre les problèmes reliés à la redistribution du pouvoir.

Le dialogue et la négociation avec les PN sont nécessaires pour résoudre les problèmes reliés aux modes de vie établis et/ou envisagés sur les territoires ancestraux, à l’organisation sociale, à la gestion des richesses naturelles, à l’occupation des territoires, aux multiples intérêts des développements industriels et économiques, aux choix technologiques, etc. ;

L’intégrité du territoire ancestral d’une PN doit être garantie dans le cadre d’un processus de négociation.

Si le Gouvernement fédéral et le Gouvernement du Québec reconnaissent ces dimensions stratégiques, alors il est possible :

De mettre en place un État qui regrouperait la nation canadienne, la nation québécoise et les PN, reconnaîtrait leurs diversités culturelles et favoriserait l’exercice équitable du pouvoir.

De créer, une instance politique regroupant également les nations afin d’harmoniser la liberté d’autonomie gouvernementale des PN et un ordre social juste pour orienter les relations de nation à nation.

D’implanter une tribune des débats entre les nations afin de se prémunir contre les effets négatifs des lois votées par la majorité et d’y exercer un droit de vote des nations.

De se servir du pluralisme juridique pour réconcilier les droits des PN et les droits inclus dans un État plurinational.

De faire légitimer, avec le consentement des PN, une nouvelle gouvernance basée sur la capacité d’agir ensemble et la prise en compte de tous les aspects d’un développement durable sur les territoires ancestraux des premières nations.

Réjean Côté (Wickham) et Gilbert Pilot

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