Jean-Claude Paquet fait partie d’une «race en voie de disparition»

Jean-Claude Paquet fait partie d’une «race en voie de disparition»
Jean-Claude Paquet est l’un des rares chansonniers au Québec à se produire encore lors de soupers musicaux dans un restaurant. (Photo : (Photo Journal L'Express))

Par Jean-Claude Bonneau

Il est pratiquement révolu le temps des pianos-bars et des restaurant qui proposent des soupers chantants. En fait, rares sont les chansonniers qui font toujours ce genre de carrière. Et pourtant, à Drummondville, on retrouve ce «phénomène rare», cette espèce de «dernier des Mohicans», ce chansonnier qui, fort d’une carrière de quelque 50 ans dans le monde de la musique, permet encore aux gens de vivre des moments agréables. Son nom : Jean-Claude Paquet.

Depuis une vingtaine d’années, ce Drummondvillois d’adoption agrémente les soupers de centaines de personnes, en leur proposant un répertoire très varié allant du blues, au rock et au populaire, en passant quelquefois par le classique. Quatre soirs semaines, du mercredi au samedi, Jean-Claude Paquet accompagne les amants de belle musique de passage au restaurant Horace au Boulevard en leur proposant des succès français, anglais, espagnols et même italiens.

Et à l’aube de ses 66 ans, M. Paquet n’a vraiment pas l’intention de remiser sa guitare. «La musique, c’est une grande partie de ma vie et j’ai bien l’intention de continuer à faire le plus beau métier du monde, celui de donner du plaisir aux gens, tant et aussi longtemps que la santé me le permettra», laisse-t-il entendre.

Il a accompagné de grandes vedettes

Jean-Claude Paquet. Photo LExpress)

C’est à la fin des années 1960 que Jean-Claude Paquet a commencé, lentement mais sûrement, à faire sa marque. Autodidacte, il a participé à un concours de guitaristes. Il a été tellement impressionnant et remarqué que des gens du milieu l’ont invité à passer des auditions pour devenir accompagnateur de quelques grandes vedettes de l’époque. Comme premier travail officiel, il a joint l’équipe de Patrick Norman.

«J’avais à peine 16 ans et je suis devenu le guitariste de Patrick Norman. Ça commence bien une carrière. De guitariste, je suis devenu le chef d’orchestre. J’ai travaillé six ans avec Patrick et j’ai aussi accompagné d’autres grands noms comme Michel Louvain, Pierre Lalonde, Michel Stax, Robert Demontigny, Alys Robi et plusieurs autres. C’était une période magique», affirme celui qui s’amuse aussi à jouer du piano.

Après huit ans à mener un train de vie endiablé, Jean-Claude Paquet a décidé de faire une pause. «J’avais 24-25 ans et j’ai voulu retourner aux études. Je me suis inscrit à l’Université McGill pour aller chercher un bac en musique. Je n’ai malheureusement pas terminé mon bac mais ce passage à McGill m’a permis de me trouver un emploi comme enseignant en musique, en arts plastiques et en géographie à la Polyvalente La Magdelaine de La Prairie et à l’école Saint-François-Xavier. J’ai fait trois ans comme enseignant mais il me manquait quelque chose.»

Début des années 1980, Jean-Claude Paquet renoue avec le milieu musical. «Un ami m’a contacté pour reprendre du service et faire partie d’une grosse production. C’était l’époque d’Intercom et de Cachemire. À l’époque, la compétition se faisait surtout avec les discos mobiles. Il fallait être créatif et oser. Ce fut des années de rock et de blues, dix belles années qui resteront gravées dans ma mémoire».

Une deuxième pause

Demeurant toujours les deux pieds sur terre, Jean-Claude Paquet s’est offert une deuxième pause. «Je me suis marié et, voulant offrir un peu plus de sécurité à ma famille, j’ai commencé à travailler en usine. À l’époque, mon père habitait Saint-Germain-de-Grantham. Je venais souvent ici et j’ai trouvé la ville fort accueillante et surtout très dynamique. J’ai donc décidé de venir m’établir à Drummondville. Je travaillais chez VitAction, une entreprise de reliure de livres, et je suis devenu directeur d’usine. Je devais certainement être heureux mais faut croire que je ne l’étais pas pleinement.

Jean-Claude Paquet. Photo LExpress)

Une journée, le téléphone sonne. Jean-Guy Grenier, un musicien très connu de la région, était au bout du fil. Il avait besoin d’un guitariste. Et v’lan, c’est reparti. J’ai dépoussiéré ma guitare et j’ai repris du service. Et je n’ai jamais arrêté depuis», mentionne celui qui a réalisé un rêve en enregistrant un premier CD, «Le bon gars», il y a quelques années.

Plus de 2800 chansons

De fil en aiguille, Jean-Claude Paquet a recommencé à faire les tournées dans les bars et dans différents évènements. Toutefois, lentement mais sûrement, les musiciens ont commencé à disparaître de ces endroits bruyants (lire bars). Certains ont même changé de carrière, mais pas notre principal intéressé.

«Il n’était pas question de prendre une troisième pause. Début 2000, j’ai décidé de travailler seul et de devenir chansonnier. Je suis retourné faire mes devoirs et j’ai recommencé à réétudier la musique, en me servant entre autres d’ordinateurs. Je suis allé chercher d’autres techniques et j’ai même monté mon petit studio à la maison.

À l’époque, André Carignan était propriétaire du Restaurant Boulevard. Il m’a alors invité à me produire au restaurant, question d’animer les soirées. J’avais un répertoire d’une trentaine de chansons que je ramenais chaque soir. Rapidement, ce fut un grand succès. Les gens appréciaient et revenaient très régulièrement.

Aujourd’hui, j’ai un cahier qui comptent environ 2800 chansons de différents styles et chaque soir de prestation, soit durant quatre à cinq heures, j’offre aux gens entre 80 et 90 chansons, incluant plusieurs demandes spéciales».

Une race en voie de disparition

Aujourd’hui, Jean-Claude Paquet fait partie d’une race en voie de disparition, celle des chansonniers dans les bars et les restos.

«C’est dommage car les gens apprécient énormément ce que je fais. Même si les discos ont assuré la relève, je pense qu’il y a encore de la place et de l’intérêt pour les chansonniers. Au Restaurant Boulevard, on a compris ça. Les propriétaires m’offrent une vitrine exceptionnelle et me donnent carte blanche, en ce qui a trait à l’animation des soirées.

Contrairement aux bars, l’atmosphère dans un restaurant est différente. Les gens sont plus à l’écoute et apprécient beaucoup ce qu’on fait. C’est extraordinaire. Chaque soir, je m’adapte à la clientèle (entre 125 et 150 personnes) qui est venue pour le souper chantant. Je me promène dans le blues, le rock, le populaire, le country. Il y en a pour tous les goûts. Et croyez-le ou non, mais ce ne sont pas que des Drummondvillois qui nous visitent et qui reviennent. Nous avons une clientèle qui vient d’un peu partout au Québec, de Montréal, de Laval, d’Asbestos, de Sorel, de Sherbrooke, de Joliette, du Centre-du-Québec. J’ai même rencontré des gens de La Tuque qui reviennent occasionnellement pour passer une bonne soirée. On reçoit des gens mariés, des célibataires et même des petites familles. Il n’y a pas si longtemps, une jeune dame d’une vingtaine d’années est venue me voir pour une demande spéciale en me disant qu’elle me connaissait depuis longtemps, puisqu’elle venait souper au Boulevard, avec ses parents, lorsqu’elle n’avait que sept ou huit ans. Ce sont de beaux témoignages qui me vont directement au cœur», renchérit M. Paquet.

Celui qui qualifie son travail de pur bonheur ne se cache pas pour avouer qu’il a toutefois dû se discipliner pour passer au travers de toutes ces années.

«Je chante quatre soirs semaine mais je pratique aussi une quinzaine d’heures par semaine. Et, très régulièrement, j’ajoute de nouvelles chansons à mon répertoire, question de plaire à tous. J’essaie toujours d’offrir un peu et même beaucoup de bonheur aux gens qui viennent m’écouter et en retour, je reçois beaucoup. Puis, une couple de fois par mois, je fais des petits tours de chant dans des centres hospitaliers, question d’apporter un peu de bon temps aux résidents».

Questionné à savoir s’il a des chansons fétiches, Jean-Claude Paquet n’hésite pas. «Perce les nuages, versions de Patrick Norman ou de Paul Daraîche, et Hallelujah de Léonard Cohen font vraiment partie des chansons que sont souvent demandées. Mais il y en a beaucoup d’autres», conclut celui qui sourit à la vie et qui apprécie au plus haut point le contact avec les gens.

 

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