L’éleveur Jean Côté débouté en Cour supérieure

L’éleveur Jean Côté débouté en Cour supérieure

Jean côté et sa conjointe Pascale Cardin devant leur ferme à Saint-Félix-de-Kingsey en 2011

JUSTICE. Même si un recours collectif a été autorisé contre Écolait, ça ne veut pas dire que la cause est gagnée pour les producteurs de veaux, car, dans le cas de la Ferme Jean Côté, la Cour supérieure a jugé, pas plus tard que le 24 mars 2016, que le contrat ne pouvait être considéré comme abusif.

Dans cette affaire, les demandeurs, Jean côté et sa conjointe Pascale Cardin, après avoir signé une entente avec Écolait en 2002, ont finalement tout perdu. Ils ont raconté avoir travaillé sept ans, sept jours par semaine, pour voir la compagnie maskoutaine reprendre leur ferme d’une valeur de 300 000 $ et un terrain de plus de 100 acres.

Son histoire commence en septembre 2002 lorsque Jean Côté se rend à la Financière Agricole, bureau de Drummondville, pour s’informer des possibilités de démarrer une ferme laitière. Un fonctionnaire lui dit que c’est impossible, vu le manque de fonds disponibles pour l’achat de quotas, et lui recommande de contacter un intégrateur (transformateur), en l’occurrence Écolait, avec qui il signe un contrat, comprenant diverses clauses dont il n’évaluera que trop tard les véritables effets. Confiant, il entreprend d’élever des veaux de lait sur sa ferme située à Saint-Félix-de-Kingsey.

Mais il perd de l’argent. Les années déficitaires s’accumulent. En septembre 2008, devant les dettes importantes de l’éleveur, Écolait reprend la ferme à la suite d’une séance de médiation en matière d’endettement agricole. Deux mois plus tard, le nouveau propriétaire, Écolait, loue la même ferme à Jean Côté et à sa femme devenus locataires. Le bail, qui débute le premier janvier 2009 pour une durée de cinq ans, prévoit un loyer mensuel de 4300 $. Mais il n’arrive pas plus à joindre les deux bouts. Sa marge de crédit est au maximum. Commence une dépression et son médecin le met en arrêt de travail le 10 novembre 2010. Les quelque 600 veaux sont sortis de la ferme et une partie de ceux-là sont menés dans un abattoir aux États-Unis.

Dans le jugement du 24 mars dernier, le tribunal indique que «pour réussir dans ce genre de procédure, il faut prouver une conduite abusive empreinte de mauvaise foi de la part d’Écolait… la preuve n’établit pas une telle conduite». Et il ajoute : «La preuve démontre qu’Écolait a procédé selon et de la façon prévue aux contrats… Malheureusement, après sept ans d’exploitation, les demandeurs décidèrent de mettre fin à l’exploitation de leur ferme en raison des procédures intentées par la Banque Nationale du Canada. Écolait ne fut informée de ce fait qu’une fois la décision prise par les demandeurs. À ce moment, la marge de crédit non remboursée était de 554 071 $. Écolait ne récupèrera rien de cette somme et ne tentera même pas de récupérer quoique ce soit des demandeurs».

Rejetant l’action des demandeurs, le juge André Wery les condamne à payer à la défenderesse la somme de 10 300 $ avec les intérêts et l’indemnité additionnelle depuis la date de la mise en demeure du 4 novembre 2010.

Me Paul Biron, l’avocat de Jean Côté, a fait savoir qu’il ira en appel de ce jugement. Il soumet que le juge Wery n’a pas tenu compte du contrat verbal. «Le témoin de l’intimée (Écolait), Yves Barbet, a admis l’existence d’un contrat verbal intervenu en même temps que le contrat écrit… Cela est évident puisque nulle part dans le contrat écrit il n’est question des sommes versées de 100 $ à 125 $ par veau ni leur motif».

Par ailleurs, la cause de Jean Côté ne peut être incluse dans le recours collectif que vient d’autoriser la Cour d’appel, ayant été initiée avant.

À la Fédération des producteurs de veaux de lait, on ne prend pas position. «Premièrement, parce que nos producteurs ne nous l’ont jamais demandé. Deuxièmement, nous avons des modèles de contrat type entre producteur et intégrateur et nous sommes en mesure d’en fournir aux éleveurs qui en font la demande», a attesté le directeur général Jean-Philippe Deschênes. «Avec le jugement autorisant le recours collectif et celui de l’affaire Jean Côté, on peut voir venir tout un débat sur cette question», a donné à entendre M. Deschênes.

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