Charlotte veut jouer au hockey avec les garçons

Charlotte veut jouer au hockey avec les garçons
Charlotte Girard

HOCKEY. Une jeune hockeyeuse devrait-elle avoir le choix d’évoluer au sein d’une équipe masculine ou féminine selon ses désirs? C’est la question que soulève le cas de la petite Charlotte Girard, 10 ans, de Saint-Germain-de-Grantham.

Évoluant au poste de gardienne de but, Charlotte préfère jouer au hockey masculin. Le hic, c’est que depuis 2012, une jeune fille désirant faire partie de l’Association de hockey mineur de Drummondville (AHMD) doit s’inscrire au hockey féminin «sans exception» est-il précisé sur le formulaire d’inscription. Une situation que déplore le père de Charlotte, Dominic Girard.

«C’est une longue histoire. On pourrait en faire un film, lance-t-il d’emblée. Ma fille a toujours voulu jouer au hockey avec les gars. Elle trouve que le calibre de jeu y est meilleur. Elle m’a même dit qu’elle préférait lâcher le hockey plutôt que de jouer avec des filles. C’est son choix et je le respecte. Le problème, c’est que l’AHMD n’accepte pas ça. Ma fille a été bannie du hockey à Drummondville.»

Invoquant le règlement 4.8 C de Hockey Québec, qui permet à une joueuse de s’aligner avec une équipe masculine sur présentation d’un avis écrit, Dominic Girard a inscrit sa fille au sein d’une équipe masculine novice en 2012, et ce, même si cette possibilité n’existe plus sur le formulaire d’inscription de l’AHMD. S’en est suivi une longue saga…

«Comme il manquait une gardienne dans une équipe féminine atome, l’AHMD a proposé à Charlotte de jouer au hockey féminin. Charlotte a accepté d’aller dépanner, mais en priorisant le hockey masculin, par exemple quand deux tournois tombaient en même temps. L’AHMD n’a jamais accepté cette situation. Charlotte a quand même joué avec les garçons cette année-là, même si l’Association a menacé de la suspendre», raconte Dominic Girard.

Après un exil d’un an à Acton Vale, où elle a joué avec une équipe masculine atome, Charlotte a voulu revenir jouer à Drummondville cette année, mais son inscription a été refusée pour une raison administrative.

«En raison d’une séparation, la mère de Charlotte habitait sur le territoire d’Acton Vale l’an dernier, alors on a choisi de l’inscrire là-bas. Comme sa mère est revenue habiter ici cette année, on a inscrit Charlotte à Drummondville. Quelqu’un de l’AHMD m’a rappelé pour me dire que ma fille n’était pas prise, parce que la date limite pour décider sur quel territoire elle voulait jouer était dépassée. Pourtant, on n’avait pas à prendre une telle décision, car ses deux parents habitent à nouveau sur le territoire de Drummondville. Finalement, Charlotte a choisi d’aller à Granby, où elle avait été invitée», déplore Dominic Girard, en ajoutant que d’autres jeunes filles de la région sont contraintes d’intégrer le hockey féminin même si elles souhaiteraient jouer avec les garçons.

La position de l’AHMD

Appelée à commenter la situation, la présidente de l’Association de hockey mineur de Drummondville, Lise Lemaire, reconnue comme l’une des grandes bâtisseuses et défenseure du hockey féminin au Québec, n’a pas cherché à se défiler.

«C’est écrit noir sur blanc sur notre formulaire. Les filles qui veulent jouer au hockey sont dirigées vers les équipes de filles. Elles n’ont pas le choix, à moins qu’elles soient aptes à jouer dans une catégorie plus haute chez les garçons», explique-t-elle, en alléguant que cette façon de faire respecte la réglementation de Hockey Québec.

«Si on permettait aux filles jouer avec les garçons, on n’aurait plus assez de joueuses, donc plus assez d’équipes, et ultimement, plus de hockey féminin. D’ailleurs, la question ne se pose même pas dans les autres sports. Aucune fille ne joue au soccer avec les garçons.»

Selon Mme Lemaire, l’AHMD n’a jamais tenté d’empêcher la jeune Charlotte de jouer au hockey, tentant au contraire de trouver des solutions pour l’accommoder. Au sujet de la demande d’inscription refusée plus tôt cette année, elle soutient qu’à la date limite du 1er août, ses droits appartenaient toujours au territoire d’Acton Vale.

«En 2012, on a même proposé à M. Girard de faire jouer sa fille avec deux équipes, en priorisant le hockey féminin lors des tournois, ce qu’il a refusé. Certains parents croient que leur fille va devenir moins bonne si elle joue avec d’autres filles. C’est ce genre de raisonnement qui fait reculer le hockey féminin.»

En terminant, Lise Lemaire rappelle que la structure de hockey féminin mise sur pied il y a quelques années à Drummondville est rapidement devenue un modèle à travers le Québec.

«Les mentalités ont beaucoup évolué au cours des dernières années. D’ailleurs, la majorité des autres associations au Québec font maintenant jouer les filles avec les filles. À Drummondville, on a démontré que c’est une formule gagnante. La preuve, c’est que plusieurs de nos joueuses sont invitées aux camps d’Équipe Québec chaque année. Elles ont grandi dans le hockey féminin: elles sont la preuve vivante que le calibre y est excellent.»

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