La médecine n’a pu la sauver

La médecine n’a pu la sauver

DRUMMONDVILLE. Le quatrième jour de procès à la suite de la "hutte" de sudation mortelle à Durham-Sud a d’abord donné la parole aux paramédics qui ont dû intervenir sur les lieux du drame ainsi qu’à l’urgentologue de Sainte-Croix qui a tenté, avec son équipe, son possible pour sauver Chantal Lavigne… en vain.

Le premier ambulancier à avoir témoigné, Jean Dumont, faisait partie de l’équipe de Richmond, qui a d’abord été appelée à intervenir au 253, rang 10 à Durham-Sud pour un problème diabétique. Il était dépassé minuit, le 29 juillet 2011, lorsqu’il est arrivé sur place. Il s’est alors rendu compte qu’une personne était inconsciente. Il s’agissait de Chantal Lavigne. Après avoir vérifié son taux de glycémie (12,4), il a éliminé le motif premier de l’appel.

Il cherchait à comprendre

Devant cette femme inconsciente, il a questionné Gabrielle Fréchette et Gérald Fontaine, qui étaient sur les lieux. Il se demandait si la personne s’était cogné la tête, etc. "Tout ce que j’avais, c’était des réponses évasives (…)", a communiqué celui qui cherchait à comprendre. Il était perplexe de voir des femmes nues, dont le corps paraissait sale.

Mme Fréchette lui a indiqué que des exercices de respirations rapides et profondes ainsi que des bains de terre avaient eu lieu dans le cadre d’une thérapie. "Le monsieur (Gérald Fontaine) ne s’est jamais adressé à moi", a-t-il spécifié.

Comme Chantal Lavigne, étendue au sol, était en train de s’étouffer avec sa langue, une guédelle a été insérée dans sa bouche afin de dégager ses voies respiratoires. Son pouls et sa respiration, avec crépitements, étaient très rapides. Un masque à oxygène lui a été installé. Ses pupilles non réactives démontraient son état d’inconscience.

Quant à sa voisine, Julie Théberge, elle essayait de vomir.

Une intoxication?

Mme Théberge a été prise en charge par l’équipe de paramédics de Drummondville, composée de Nicolas Prévost Drouin, Jean-Philippe Guay et d’un stagiaire.

Son état de conscience était altéré. "Elle ne répondait pas bien aux questions de base", souligne M. Drouin. Son pouls était régulier, mais un peu rapide. Sa condition respiratoire était correcte. Sa pression, plutôt basse, permettait de qualifier son état d’instable.

"Je pensais qu’il s’agissait d’une intoxication volontaire ou involontaire", rapporte M. Drouin. Les membres de cette équipe tentaient également de saisir ce qui se passait. Gabrielle Fréchette leur a assuré qu’aucune personne n’avait consommé de drogue ou d’alcool. De nouveau, elle a fait valoir qu’une thérapie sous forme de ressourcement, avait eu lieu, avec des enveloppements de terre pour canaliser l’énergie. M. Fontaine validait les explications.

Une troisième victime

Ginette Duclos aurait porté à l’attention des paramédics qu’une autre femme éprouvait des malaises. Il s’agissait d’une grande femme mince, âgée dans la mi-trentaine, aux cheveux noirs.

"La dame nue vomissait dans le lavabo", enchaîne le paramédic, précisant qu’elle disait se sentir bien. Elle refusait les soins offerts et a même signé une déclaration à cet effet.

Lorsque les paramédics ont quitté la fermette, ils ont demandé à la Sûreté du Québec de se rendre sur place, qualifiant l’endroit de "douteux".

Mmes Lavigne et Théberge ont toutes deux été transportées à l’hôpital Sainte-Croix, où l’équipe de l’urgence les attendait. Elles ont immédiatement été prises en charge.

Enfin le diagnostic

Les victimes avaient le même diagnostic, à un degré variable : coup de chaleur, déshydratation et état de choc secondaire.

Le dernier cas survient lorsque les cellules ne reçoivent pas assez d’oxygène, ce qui est attribuable à une circulation sanguine déficiente.

Mme Lavigne avait atteint le niveau 4, qui correspond au degré le plus grave de choc cellulaire.

Les deux femmes ont dû être hydratées par intraveineux. L’état de santé de Julie Théberge s’est amélioré de telle sorte qu’elle a pu quitter le centre hospitalier, au matin. Son amie a eu moins de chance.

Le problème, dans son cas, était aggravé par le fait que ses veines s’étaient rétrécies. Elles étaient pratiquement vides. "Les infirmières n’ont pas été capables d’installer le soluté. (…) J’ai dû installer une voie à travers un os", a expliqué le Dr Daniel Lafleur, urgentologue à l’hôpital Sainte-Croix. Il s’agit d’une mesure vraiment exceptionnelle.

Ses organes vitaux n’étaient presque plus oxygénés. "Le sang ne se rendait plus au cœur", a-t-il ajouté.

La patiente a été intubée. Des médicaments pour faire augmenter sa pression lui ont été administrés. Toutefois, peu d’améliorations ont été observées.

Des complications sont survenues

Au contraire, Chantal Lavigne s’est mise à avoir des saignements, ce qui correspond à une complication grave de l’état de choc 4, que le Dr Lafleur appelle la coagulation intravasculaire disséminée.

Par exemple, la patiente s’était mise à saigner de partout (endroits où elle avait été intubée ou reçu des prises de sang, vagin, etc). "On a transfusé du sang, des plaquettes, des facteurs de coagulation. On n’est jamais venu à bout des saignements", a expliqué l’urgentologue. Les organes de Chantal Lavigne ont alors flanché, les uns après les autres.

En après-midi, le 29 juillet 2011, elle a été transférée au Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke, à Fleurimont, où elle a rendu l’âme.

Questionné par la juge Hélène Fabi pour connaître les raisons qui ont motivé ce transfert, Dr Lafleur explique qu’il a tenté d’obtenir une deuxième opinion, en dernier recours. "L’équipe de Drummondville avait tout fait ce qui était en son pouvoir", a-t-il conclu.

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