François Munyabagisha : le génocide rwandais vu de l’intérieur

Par Maxime Rioux
François Munyabagisha : le génocide rwandais vu de l’intérieur
Francois Munyabagisha

Tout le monde se souvient et se souviendra du génocide survenu au Rwanda en 1994. Cependant, tous n’étaient pas sur place pour voir l’horreur et prendre en considération moult événements particuliers survenus avant, pendant et après ce massacre. François Munyabagisha, un Drummondvillois d’adoption, était sur place. Dix-neuf ans après avoir vécu le drame de l’intérieur, il vient de signer un livre lui permettant de présenter sa vision toute personnelle.

«J’avais besoin de dire des choses importantes. À mon avis, à l’issue de ce génocide, on a criminalisé des gens innocents, voire des héros. À l’inverse, on a applaudi des criminels. L’écriture de ce livre était une belle occasion pour moi de dire ce qui s’est passé. Je sais que je ne ferai pas l’unanimité, mais mon souhait ultime est de donner aux Rwandais une façon de voir les choses d’une façon qui peut nous réconcilier», a récemment partagé à L’Express M. Munyabagisha.

Ce génocide, rappelons-le, s’est déroulé du 6 avril au 4 juillet 1994 et a été commis dans le cadre d’une guerre civile opposant le gouvernement rwandais, constitué de «Hutu», au Front patriotique rwandais (FPR), accusé par les autorités d’être essentiellement «Tutsi».

Dès lors, François Munyabagisha met notamment en lumière plusieurs faits et gestes de différentes personnes et divers organismes dans autant de contextes, passant du rôle des Casques bleus à celui tenu par Roméo Dallaire, alors commandant de la Mission des Nations unies pour l’assistance au Rwanda.

De l’intérieur

Lorsque l’action s’est déroulée, M. Munyabagisha était présent.

Il affirme même avoir aperçu deux boules de feu dans le firmament, résultat de l’explosion de l’avion abattu par des missiles et qui transportait les présidents rwandais et burundais, Juvénal Habyarimana et Cyprien Ntaryamira. La mort de ces deux dirigeants a évidemment été un fait marquant dans les événements qui ont suivi.

«Ça a commencé la nuit, se rappelle l’auteur. Je regardais la télévision et c’est alors que j’ai aperçu l’explosion. Il y a ensuite eu une panne de courant dont l’origine était suspecte. J’avais ensuite raccompagné un ami et je me sentais inquiet dans les rues où il régnait une ambiance particulière. Ce n’est que le lendemain matin que j’ai appris la mort du président. Vers 9 h ou 10 h, une «gang» est arrivée et a frappé à la porte. On m’a emmené à l’extérieur pour me tuer. Au total, j’ai été trois fois amené de la sorte.»

Difficile de s’imaginer les horreurs qu’a pu voir M. Munyabagisha durant les jours qui ont suivi.

«Le but était de sortir de Kigali, ce que moi et ma famille avons réussi à faire», poursuit l’homme marié et père de trois enfants.

Selon lui, les chiffres qui ont circulé faisant état des morts sont faux.

«On dit qu’il y a eu 800 000 ou 850 000 personnes tuées, mais je crois plutôt que c’est plutôt aux alentours de 400 000 décès», opine aussi l’homme qui a obtenu un baccalauréat de l’Université nationale du Rwanda et une maîtrise en Économie et gestion des PME de l’Université du Québec à Trois-Rivières.

Bref, le livre de François Munyabagisha permettra aux lecteurs de mieux comprendre l’historique génocide à travers les écrits d’un homme qui n’a jamais cessé de s’intéresser à l’histoire de son pays d’origine.

«J’ai écrit ce livre en laissant de côté le côté émotif», précise aussi l’auteur qui, dans son livre, transmet néanmoins un message de paix et de respect. Le passage qui suit donne un aperçu de son discours.

«La vie et la dignité de tout être humain sont sacrées. Vivre, ce n’est pas un droit, ni un dû. C’est un acquis sacré, non cessible et inaliénable. Nul n’a le droit de tuer et rien ne peut justifier d’enlever la vie à qui que ce soit.»

Partager cet article