L’anti-démarreur obligatoire n’est pas pour demain

L’anti-démarreur obligatoire n’est pas pour demain
Le coroner Yvon Garneau.

La route sera encore longue avant que Transport Canada n’en vienne à rendre obligatoire l’installation d’un anti-démarreur éthylométrique, et ce, même si une nouvelle technologie à infrarouge, plus discrète et plus précise que le dispositif actuel qui mesure l’haleine du conducteur, est sur le point de faire son apparition sur le marché.

Comme en faisaient état récemment certains médias, le sous-traitant automobile Takata et le fabricant de détecteurs éthyliques TruTouch développent conjointement un anti-démarreur éthylométrique infrarouge, plus compact, plus discret et plus précis que le dispositif actuel. Au lieu de souffler dans un tube, le conducteur passera simplement son doigt sur un petit lecteur infrarouge capable de mesurer à travers la peau le taux d’alcool dans le sang. S’il y a trop d’alcool, l’auto ne démarrera tout simplement pas. Ce système coûterait moins de 200 $.

Le coroner Yvon Garneau en avait fait une recommandation dans son rapport du 10 mai dernier, dans la foulée de la tragédie routière qui avait coûté la vie à quatre jeunes drummondvillois sur le boulevard Mercure en octobre 2010. Appelé sur les lieux de plusieurs accidents mortels impliquant de jeunes automobilistes ces deux dernières années, Me Garneau proposait « d’examiner l’opportunité de rendre obligatoire sur tous les véhicules neufs vendus au Canada un système de sécurité empêchant le démarrage si le conducteur a consommé de l’alcool ».

En juillet, dans une lettre adressée à la coroner en chef Louise Nolet, dont L’Express avait obtenu copie, Gérard McDonald, sous-ministre adjoint (sécurité et sûreté), à Transports Canada, s’était penché sur cette recommandation. Il était alors impossible, selon lui, « d’envisager un tel règlement à l’heure actuelle étant donnée que la technologie n’est pas assez élaborée. On craint que si la technologie est adoptée avant qu’elle ne soit fiable, le succès de la politique et des changements législatifs nécessaires à la politique du programme pourrait être limité de façon importante par toute réaction négative provenant du public », avait-il écrit.

Le développement d’un nouveau dispositif à infrarouge, moins intrusif, moins dispendieux et moins stigmatisant que l’anti-démarreur conventionnel, ne change rien à la position de Transports Canada.

Selon la porte-parole Maryse Durette, à Ottawa, Transports Canada continue d’analyser différents projets de recherche dans ce domaine. « Il y a un travail conjoint à faire avec les manufacturiers. Il faut évaluer les répercussions en vertu des Droits de la personne et s’assurer du respect des compétences des provinces. Un peu comme nous l’avons fait avec le dispositif ESC (Electronic Stability Control) qui sera obligatoire sur tous les véhicules à compter de 2012. L’équipement à ajouter doit avoir fait ses preuves. Ça nous a pris 15 ans avant d’arriver à cette législation. Pour le nouveau dispositif à infrarouge, on n’est pas rendus là », a-t-elle expliqué.

En attendant, il est toujours possible de participer au programme de dispositif détecteur d’alcool (anti-démarreur conventionnel) de la SAAQ et de faire installer un tel appareil dans son véhicule. Sur une base volontaire. Sauf que ce programme est assujetti à des conditions très précises. Par exemple, le participant est autorisé à conduire uniquement des véhicules routiers munis d’un dispositif détecteur d’alcool agréé par la SAAQ. De plus, lorsque la personne désire se retirer du programme, elle ne pourra le faire que lorsqu’elle aura démontré, au terme d’une évaluation de l’Association des centres de réadaptation en dépendance du Québec (ACRDQ), qu’elle peut dissocier la consommation d’alcool de la conduite d’un véhicule routier.

Le coroner drummondvillois souhaiterait une évolution plus rapide. « Moi, j’aimerais bien que les autorités compétentes étudient tout ça plus vite. À mon avis, il y a urgence, il y a hécatombe. Nos rapports crient au secours. J’espère qu’on n’attendra pas 15 ans et 500 victimes avant d’agir… Dans le monde hyper technologique dans lequel nous vivons, je ne peux comprendre que nous ne puissions pas agir immédiatement. C’est une question de vie ou de mort après tout », a commenté Me Garneau.

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