Un admirable retour à la peinture après un long et tortueux détour

Par Maxime Rioux

À partir du moment où elle a été capable de tenir un pinceau entre ses petits doigts jusqu’à l’âge de huit ans, Marie-Hélène Poirier a entretenu une véritable passion pour la peinture à l’instar des membres de sa famille (du côté de son père). Toute petite, elle se démarquait des autres enfants grâce à un talent précoce. Malheureusement, un tragique accident l’a forcée à cesser de peindre du jour au lendemain, et ce, durant six longues années. Après ce délai, elle a choisi de reprendre le pinceau et voilà qu’à 29 ans, elle prépare sa toute première exposition.

En 1991, durant un après-midi tout à fait ordinaire, la vie de Marie-Hélène Poirier a basculé. Ce jour-là, trois semaines avant de célébrer ses neuf ans, elle a été violemment heurtée par une voiture sur la rue Daniel, juste en face de la maison familiale, et ce, devant les yeux horrifiés de son père et de sa grande sœur. Ayant subi un traumatisme crânien sévère (et une fracture du tibia), la fillette a été immédiatement dirigée vers un hôpital de Montréal.

«Marie-Hélène a été dans un coma profond pendant six semaines et dans un coma vigile durant cinq mois, se rappelle sa mère, Denise Poirier. Elle a passé deux ans dans des hôpitaux de Montréal dont trois mois à Sainte-Justine. Nous faisions la route tous les jours pour aller la voir. Elle a séjourné 21 mois à l’hôpital Marie-Enfant. Avant que Marie-Hélène ne revienne à la maison de façon définitive, nous avions eu le temps d’adapter notre résidence en vue de son retour.»

En ces temps-là, les diagnostics énoncés n’étaient pas toujours les mêmes, mais ils avaient un malheureux point commun : ils étaient pour la plupart très sombres. On a d’abord cru que la jeune Marie-Hélène ne sortirait peut-être jamais du coma. Par la suite, on affirmait qu’elle resterait probablement quadriplégique.

«Elle est restée neuf mois sans parler, précise sa mère. Avant son accident, Marie-Hélène terminait sa troisième année et elle figurait parmi les meilleures de sa classe. Après son accident, elle a continué d’aller à l’école dans des classes adaptées, notamment à l’école Pie-X, où elle a fait ses mathématiques et son français, puis à l’école Marie-Enfant. À 13 ans, elle a fréquenté l’école Saint-Frédéric et, à 21 ans, elle a terminé son présecondaire en français. Plus tard, elle a aussi suivi des cours aux adultes.»

Depuis son accident, Marie-Hélène a des difficultés de langage et elle a notamment perdu l’usage de sa main droite. Elle est aussi atteinte d’hypotonie du tronc, ce qui, en quelque sorte, se résume en une perte de tonus qui la conduit à être souvent penchée vers l’avant. Pour cette droitière, le fait de perdre complètement l’usage de sa main droite a évidemment signifié un deuil important.

«Chaque année, je demandais à Marie-Hélène si elle souhaitait recommencer à suivre des cours de peinture et, chaque fois, elle me répondait non. En 1997, toutefois, elle m’a dit qu’elle aimerait recommencer (elle avait suivi des cours alors qu’elle était enfant). Ce fut le début d’un long apprentissage.

Tout recommencer

Lorsqu’on est forcé d’oublier sa main droite pour peindre, il n’y a pas d’autres façons que de tout réapprendre.

«Lorsqu’elle a recommencé à suivre des cours, Marie-Hélène se rendait dans une école de peinture. Elle a fréquenté cet endroit durant quelques années. Depuis 2006, elle compte sur une professeure privée en la personne de Shirley Côté. Mme Côté est très dévouée avec elle. Depuis quelque temps, Marie-Hélène a même reçu des commandes de personnes qui ont vu ses toiles et qui étaient intéressées à en avoir une. C’est valorisant pour elle. Cependant, il ne faut pas qu’elle s’épuise à la tâche. Une des particularités des personnes qui ont vécu un traumatisme crânien grave est qu’elles se fatiguent rapidement. Présentement, elle suit des cours d’une heure trente chacun et c’est parfait ainsi. C’est durant ce temps qu’elle travaille sur ses toiles», explique Denise Poirier qui soutient que «toute personne humaine doit avoir un projet de vie et être valorisée, quelle que soit sa condition»,

Première exposition

Ainsi, après plusieurs années de travail ardu de la part de l’artiste, une vingtaine de toiles de Marie-Hélène Poirier seront exposées du 5 novembre au 31 décembre à la Place Charpentier (entre le magasin Hart et le salon de quilles La Place), en collaboration avec l’entreprise Encadrement Ayotte, située dans ce même centre commercial.

Les personnes qui se rendront voir ces tableaux pourront facilement imaginer la somme de temps et de travail nécessaire à leur création.

Il va sans dire que la détermination de Marie-Hélène Poirier force l’admiration.

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