Germaine Morin-Proulx

Par Maxime Rioux

Véritable ambassadrice de la culture et pionnière du monde de la danse, Germaine Morin-Proulx est décédée à l’hôpital Sainte-Croix, dimanche dernier, des suites d’une longue maladie. Depuis, nombreux sont ceux qui ont tenu à témoigner leur reconnaissance envers cette femme que d’aucuns qualifiaient de forte et tenace.

Née à Saint-Félix-de-Kingsey le 18 janvier 1923, Germaine Morin-Proulx a amorcé sa carrière en qualité d’enseignante à l’école primaire anglaise de Saint-Félix-de-Kingsey, de 1942 à 1946. Après avoir quitté cet emploi pour des raisons de santé, elle a choisi de s’installer à Drummondville où elle a occupé des postes en comptabilité à la Banque provinciale et à l’usine Dennison où elle a travaillé de 1947 à 1958.

Par la suite, elle est revenue à l’enseignement, de 1965 à 1987. Elle enseignait alors l’anglais à l’école secondaire Jeanne-Mance. Elle a aussi agi durant six ans comme responsable syndicale dans ce même établissement.

En 1953, Germaine Morin est devenue Germaine Morin-Proulx en unissant sa destinée à celle d’Euclide Proulx avec qui elle a eu trois enfants : Denis, Louise et Christiane. Euclide avait déjà une fille prénommée Micheline d’un premier mariage.

«Maman a toujours considéré Micheline comme sa propre fille», partage Christiane.

Défricheuse et battante

Considérée comme une pionnière à plusieurs égards, Germaine Morin-Proulx n’a jamais cessé de s’investir à différents niveaux dans sa communauté, parfois, contre vents et marées. À preuve, en juin dernier, elle participait au Relais pour la vie et, en mai, elle prenait part au spectacle annuel des jeunes élèves de l’Académie de ballet de Drummondville, une institution d’enseignement qu’elle a cofondée voilà 65 ans. À 88 ans, avant que le cancer qui l’affligeait refasse surface, Mme Morin-Proulx était encore animée d’une énergie débordante.

«À l’hôpital, au cours des derniers jours, elle disait qu’elle aimerait avoir le temps de voir la Maison des arts Desjardins. Elle était très impliquée dans le Centre culturel. Pour elle, l’ouverture de l’établissement après les rénovations majeures était quelque chose de très important. Elle a gardé espoir jusqu’à la toute dernière journée», assure Christiane Proulx.

Engagée dans de nombreux dossiers tout au long de sa carrière, Mme Morin-Proulx était bien connue des citoyens de Drummondville. Elle avait aussi des cartes cachées, comme ce baccalauréat en chant grégorien, obtenu à l’Université du Québec à Montréal. Ainsi, peu de personnes savent que Mme Morin-Proulx a été juge lors des premiers examens en chant grégorien dans le diocèse de Nicolet, de 1942 à 1945. Cette énergique femme possédait les cinq degrés de formation du chant grégorien chez les Pères bénédictins de Saint-Benoît-du-Lac, ce qui est plutôt rare, même chez les moines.

Elle a aussi suivi des formations en cinéma et en art dramatique, notamment durant les années 1940.

«Maman était une battante, une vraie de vraie. Elle était ce qu’on appelle une femme de tête. Lorsqu’elle a fondé l’Académie de ballet, certaines personnes allaient inscrire leur enfant en cachette parce que les sœurs n’aimaient pas beaucoup la danse à cette époque. C’était une femme orgueilleuse et fière, qui accordait aussi une grande importance à la présentation des personnes et des choses. Elle prenait grand soin d’elle-même; elle était toujours bien mise», rappelle Christiane Proulx.

Engagement reconnu

Au fil du temps, Germaine Morin-Proulx a tracé sa voie en laissant sa marque, comme le témoigne la salle de danse qui portait son nom à l’ex-Centre culturel et qui le perpétuera dans la future Maison des arts Desjardins Drummond.

«En novembre 2006, les membres de la Chambre de commerce et d’industrie de Drummond l’ont intronisée au Temple de la renommée des affaires et l’ont sacrée «Bâtisseur» pour sa persévérance et parce qu’ils voyaient en elle une femme de tête, rappelle sa fille Christiane.

À cette occasion, Mme Morin-Proulx y avait été d’un discours qui en disait long sur son parcours et sa vision.

«J’aimerais que vous gardiez de moi l’image d’une pionnière dans le développement culturel de la région. Il ne faut pas penser que toutes mes réalisations se sont faites facilement. En plus de me battre pour que la place des femmes soit reconnue dans la société, j’ai toujours eu à combattre l’ordre établi, les vieilles mentalités et les préjugés, et ce, pour faire éclater l’art et la culture sous toutes ses formes», avait-elle alors affirmé fièrement.

Au fil de sa vie, Germaine Morin-Proulx a notamment fait partie des Filles d’Isabelle, du Club Richelieu féminin et des chorales Après l’école et Saint-Frédéric.

En 1993, elle a reçu la Médaille commémorative du 125e anniversaire de la Confédération du Canada. En 1995, elle a mérité la Médaille du Lieutenant-gouverneur du Québec à titre de représentante d’une famille irlandaise (son arrière-grand-mère maternelle est Marguerite Kelly) lors de la commémoration du 150e anniversaire de l’arrivée des Irlandais au Québec. En 1996, lors du 50 e anniversaire de l’Académie de ballet, on donna le nom de Germaine-Morin-Proulx à la salle de ballet du Centre culturel. Une plaque hommage lui avait aussi été décernée à cette occasion.

«C’est difficile de retrouver tous les organismes dont ma mère a fait partie, concède Christiane Proulx. Ma mère aimait tout le monde et savait se faire aimer de tous. Je sais qu’elle a pris part à la fondation de quelques chorales et qu’elle en a dirigées certaines.»

Maladie

Il y a 33 ans, Germaine Morin-Proulx avait déjà dû livrer un difficile combat contre un premier cancer du sein. Par la suite, cette battante a affronté un second cancer du même type, puis un troisième, qui cette fois s’est attaqué aux muscles de l’estomac. C’est d’ailleurs une virulente récidive de ce dernier qui aura finalement eu raison d’elle.

«Ma mère a bien connu la maladie. Elle s’est toujours montrée forte face à elle. Je me souviens de l’avoir entendue me parler des inscriptions à l’école de danse alors qu’elle était alitée, à l’hôpital. Son engagement dans la communauté et le travail contribuaient à la garder en vie», assure sa fille.

Malade, elle a même choisi de contrer la maladie d’une façon active.

«Il y a 33 ans, lors de son premier cancer, elle s’était inscrite à un protocole de recherches visant à contrer le cancer du sein. Elle avait même fait l’objet d’un petit reportage dans lequel elle raconte son cheminement dans la maladie et remercie les médecins», relate Christiane Proulx, qui depuis le décès de sa mère, a pris en charge la direction générale de l’Académie de ballet.

Funérailles

Germaine Morin Proulx sera exposée au funérarium Daniel Vachon (211, rue Lindsay), de 14 h à 17 h, ainsi que de 19 h à 22 h, le vendredi 22 juillet 2011. Le samedi, jour des funérailles, les portes du funérarium ouvriront à 8 h 30, jusqu’au départ, à 9 h 40.

Les funérailles seront célébrées à 10 h en l’église Saint-Frédéric. Par la suite, l’inhumation sera effectuée au cimetière Saint-Pierre.

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