Souvenirs d’un authentique ex-«Coloc»

Par Maxime Rioux
Souvenirs d’un authentique ex-«Coloc»
Serge Robert

Premier bassiste officiel de la formation Les Colocs, Serge Robert, alias Mononc Serge, qui était de passage au Cabaret Box Office vendredi dernier, a côtoyé les regrettés Patrick Esposito Di Napoli (alias Pat Napoli), harmoniciste de ce groupe, décédé du sida en novembre 1994, et André Fortin (alias Dédé Fortin), qui s’est enlevé la vie en 2000. Mais quels souvenirs conserve Serge Robert de son passage dans ce groupe-phare?

D’abord, rappelons que lors des premiers spectacles des Colocs, avant l’arrivée de Serge Robert, c’est l’auteur-compositeur-interprète Marc Déry qui jouait la basse au sein de cette formation. Cet artiste émérite ne faisait toutefois pas partie du groupe de façon officielle; son travail consistant à jouer exclusivement lors des spectacles. En décembre 1990, Serge Robert a donc officiellement fait son entrée et a pris les commandes de cet instrument. Et que se passait-il au sein des Colocs? «Honnêtement, pour ma part, je dois dire que ce n’était pas toujours facile. En particulier, avec André (Dédé Fortin). Malgré tout le respect que nous avions l’un pour l’autre, nous étions souvent en désaccord. Sans dire que nous étions toujours à couteaux tirés, je dirais qu’il y avait souvent des frictions entre lui et moi. Entre autres, de mon côté, je souhaitais continuer de participer à des projets musicaux en dehors des Colocs, mais André me le reprochait; il voulait que toute mon énergie et celle des autres soient consacrées aux Colocs. Bien que cette façon de faire n’était pas mauvaise, de mon côté, ça ne me convenait pas de prendre part exclusivement à un projet, même au moment où le succès a commencé à nous sourire. J’avais besoin d’autre chose.»

Ainsi, avant de créer sa subversive deuxième identité, Mononc Serge, Serge Robert a évolué au sein de deux formations, soit Les Quarts de rouge, avec Pat Napoli et Yves Desrosiers (guitariste de Jean Leloup-Leclerc à l’époque de La Sale affaire) et Les Blaireaux (en duo avec Yves Desrosiers, à la suite du décès de Pat Napoli).

Le bassiste-chanteur jouait donc principalement avec Les Colocs, mais se gardait du temps pour composer avec Les Quarts de rouge, qui donnaient surtout dans les interprétations, notamment des pièces de Nino Ferrer, Bobby Lapointe et Jacques Dutronc.

Et puis, à l’époque des Colocs, Serge Robert avait déjà son côté fanfaron qui n’était pas particulièrement apprécié par Dédé Fortin. «André était un peu dictatorial. Entre autres, il me disait qu’il n’aimait pas ma façon de bouger sur scène», a soutenu Serge Robert, qui affirme que sa dernière année au sein des Colocs (1995) a été l’une des plus difficiles de sa vie.

Problèmes financiers

Au moment où Les Colocs tournaient sur toutes les stations de radio québécoises et que le succès du groupe n’en finissait plus de grandir, Serge Robert s’est inquiété de voir ce qui lui restait sur sa paye personnelle après que de curieuses «déductions» furent imputées à l’ensemble du groupe.

«Je ne projette peut-être pas cette image-là, mais je suis un gars qui s’occupe beaucoup de ses affaires. À un moment donné, je me suis rendu compte qu’il y avait quelque chose qui ne tournait pas rond. Nous (Les Colocs) payions des choses et des frais divers que nous n’étions pas censés payer au départ. Il y avait plein de choses bizarroïdes qui se passaient financièrement. De l’argent disparaissait. Toute cette histoire a fait que j’ai tenté d’en savoir davantage en allant directement à la source. Une fois de plus, toute cette histoire a créé des dissensions au sein du groupe et des hostilités latentes entre moi et André, qui préférait “faire confiance”.»

Le suicide de Dédé

Comment Serge Robert a-t-il vécu le suicide de son ancien comparse Dédé Fortin?

«Honnêtement, sur le coup, je croyais qu’il avait été assassiné. Durant les cinq années que j’ai passées en sa compagnie, je ne l’ai jamais vu dépressif. Avant de joindre Les Colocs, je savais qu’il avait déjà vécu une phase dépressive, mais sans plus, a partagé l’ex-Coloc. Au cours des dernières années, il m’était arrivé de le croiser dans la rue à quelques reprises et nous discutions alors une vingtaine de minutes ensemble, mais sans plus.»

Et que pouvait bien penser Dédé Fortin des «tounes» de Mononc Serge? «Je ne sais pas, je ne lui ai jamais demandé et il ne m’en a jamais parlé. Je pense qu’il n’aimait pas ça», a humblement partagé le farfelu créateur.

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