Les difficultés des jeunes médicalisées à outrance

Les difficultés des jeunes médicalisées à outrance
Des représentants d'organismes jeunesse

SANTÉ MENTALE. Hausse des diagnostics auprès des jeunes, services psychosociaux parfois trop souvent inexistants ou déficients et médicamentation comme seule solution à tous les maux. Voilà autant de constats inquiétants qui sont ressortis d’une vaste consultation auprès de 50 organismes, 150 intervenants et 160 jeunes du Québec, dont de Drummondville, et présentés lors du Forum Jeunes et santé mentale : pour un regard différent, la semaine dernière à l’Hôtel et Suites Le Dauphin.

Cette consultation a été menée par le Regroupement des auberges du cœur du Québec (RACQ), du Regroupement des ressources alternatives en santé mentale du Québec (RRASMQ) et de l’Association des groupes d’intervention en défense des droits en santé mentale du Québec (AGIDD-SMQ). Ce collectif a observé non seulement une hausse importante du nombre de jeunes ayant un ou plusieurs diagnostics en santé mentale, mais aussi que ceux-ci se faisaient rapidement, et ce, de façon régulière. Tous ont constaté que trop souvent, les difficultés, les souffrances et les étapes normales de la vie sont médicalisées.

«Tout indique que la médicamentation devient la solution privilégiée à des problèmes qui pourraient être réglés par des moyens autres que pharmacologiques», a souligné Tristan Ouimet-Savard, coordonnateur à la défense des droits au RACQ.

Le contact humain, l’écoute, la thérapie et le sport constituent des mesures alternatives efficaces, selon lui.

«À moins d’être diabétique ou avoir des problèmes physiques, en toute logique la pilule devrait être simplement un élément transitoire», a-t-il insisté.

Il a également été noté que les suivis médicaux et thérapeutiques étaient rares ou difficiles à obtenir, se limitant souvent à reconduire ou ajuster la médication.

«La situation s’est détériorée au cours de la dernière décennie suite aux coupures successives dans les services de la santé et de l’éducation», a noté Robert Théoret, responsable à l’action politique du RRASMQ.

De surcroît, les jeunes consultés ont avoué ne pas se sentir écoutés ni respectés. En clair, certains ont confié que leurs expériences et vécus étaient banalisés par le professionnel de la santé en plus de se sentir comme un numéro. Ils ont aussi mentionné que la médication prend beaucoup de place lors des rencontres et que les alternatives et interventions psychosociales sont peu proposées.

«Ce que les jeunes veulent, c’est qu’on entende leur indignation et leur souffrance, que l’on dénonce les effets secondaires des médicaments et le manque d’information reçue à ce sujet, mais surtout, qu’on leur propose autre chose que la médication», a résumé Doris Provencher, directrice générale de l’AGIDD-SMQ. Elle a ajouté : «La médication a sa place, mais pour le moment, elle prend toute la place!»

«Beaucoup de jeunes croient que la médication est vue à tort comme une solution miracle, facile et efficace», a pour sa part indiqué M. Théoret, en affirmant que la polyconsommation (alcool, drogues et médicaments psychiatriques) augmente et se fait de plus en plus jeune.

Pour Tristan Ouimet-Savard, ce forum marque l’importance de tenir un débat public sur la médicalisation et la médicamentation des jeunes, mais surtout, «il faut que ça bouge!»

«Oui, il y a un manque de services pour les jeunes de façon individuelle, mais au-delà de ça, il faut agir sur l’environnement, sur l’entourage, donner un soutien aux familles et dépasser l’individualisation des problèmes. Il faut agir sur les causes, sur les conditions de vie! Revendiquer des services, ce n’est pas nécessairement la clé, il faut également voir comment les services sont donnés», a-t-il fait valoir.

Bref, de l’indignation, un fort désir de changement et un appel au débat public sont ressortis du forum qui a réuni 160 personnes de différents organismes de la province. Des recommandations seront prochainement faites au premier ministre ainsi qu’aux ministères concernés.

«La lutte à la médicalisation des jeunes doit devenir un enjeu de société», ont clamé les représentants.

Des commentaires d’intertevenants locaux à lire demain.

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