La tyrannie de la beauté et de la performance

La tyrannie de la beauté et de la performance
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(NDLR : Dans le cadre d’un cours au Cégep de Drummondville, les étudiants en sciences humaines Maude Beaulieu et Pier-Alexandre Vallières partagent dans cet article les fruits de leur projet d’intégration portant sur les causes et les effets des pratiques sportives néfastes chez les jeunes Drummondvillois âgés de 15 à 30 ans.)

La problématique des pratiques sportives néfastes est d’une ampleur considérable, d’autant plus qu’elle touche à plusieurs sphères faisant partie intégrante du quotidien de tous. En effet, les pratiques malsaines sont non seulement engendrées par des facteurs économiques, mais aussi, notamment, par des facteurs sociaux, culturels et psychologiques.

Le culte de la beauté étant une caractéristique substantielle de la culture nord-américaine, celui-ci cause plusieurs problèmes identitaires qui amènent les gens à suivre des modes pouvant avoir des conséquences néfastes sur leur santé. Ainsi, la pratique du sport est un exemple incontournable du type de mode que l’on peut suivre dans le but de correspondre aux normes sociales. L’activité physique, fondamentalement bonne pour l’organisme, peut aussi être utilisée à mauvais escient et ainsi causer la dégradation de celui-ci. C’est cette constatation qui guide vers les questions suivantes : quelles sont les causes qui mènent à la pratique néfaste du sport chez les jeunes de 15 à 30 ans? De nos jours, les critères de beauté et de performance étant très élevés, est-il tout de même possible d’être en bonne santé et de répondre aux normes établies en usant de moyens naturels et donc non nocifs pour l’esprit et l’organisme?

Bien que l’on se doute que l’image corporelle peut être à la base d’une pratique sportive malsaine, les chiffres ne font que ratifier cette idée. Effectivement, si l’on s’en tient juste aux adolescentes de 17 ans, 78 % d’entre elles éprouvent une insatisfaction face à leur corps. De plus, l’Institut national de la nutrition du Canada rapporte que le tiers des femmes affichant un poids santé suivent actuellement un régime, comme quoi les préoccupations de la gent féminine devant les critères véhiculés par la société et les médias se font incessantes et néfastes. Par ailleurs, une étude réalisée à l’Université du Québec à Trois-Rivières a révélé que 25 % des athlètes féminines sont insatisfaites face à leur poids, jugeant que ce dernier est trop élevé, et le résultat atteint 7 % chez les athlètes masculins.

En outre, alors que les pratiques sportives font l’objet de nombreuses statistiques, elles ne sont certainement pas non plus épargnées par les médias. S’étant fait décerner un trône par ces derniers, l’idéal corporel, soit un corps fin, musclé, tonique et performant, suscite un engouement sans précédent du public pour la perfection physique. Ainsi, le phénomène est d’une importance capitale et mérite donc que l’on se penche sur lui afin d’en démystifier les causes.

Ainsi, les pratiques sportives néfastes peuvent tirer leur origine de l’influence de l’entourage, qu’il s’agisse de la famille, d’amis, de collègues de travail, etc. En effet, le premier entraînement ou l’initiation aux salles d’entraînement et de musculation peuvent se concrétiser sur la simple suggestion d’un proche. En outre, sur le plan économique, les pratiques sportives juvéniles, en club ou hors club, peuvent correspondre à l’espoir de devenir un jour champion pour les jeunes parce qu’elles ont été professionnalisées. En d’autres mots, le sport ne se résume désormais plus qu’à un loisir ou à un moyen de se tenir en forme : les géants du capitalisme en ont fait un entreprise générant des revenus astronomiques, qu’il s’agisse du sport professionnel, des jeux olympiques, des salles d’entraînement populeuses, des produits pour sportifs, des stimulants, et bien plus encore. C’est alors que certaines personnes sont portées à employer tous les moyens nécessaires pour éviter que le niveau de leurs performances physiques ne diminue ou ne stagne, et le dopage en est un exemple parfait. Or, bien que celui-ci soit interdit, «[son] admissibilité […] dans le milieu sportif est cautionnée par l’effort accompli et si l’on ne consomme pas forcément ouvertement, il est clair que l’encadrement ne cherche pas réellement à contrôler ces consommations.»

Une première cause psychologique conduisant à une pratique sportive néfaste est le besoin d’un sentiment de réalisation de soi au sein d’une société dans laquelle corps idéal et performance règnent en maîtres. Ceci peut s’accompagner d’un besoin de reconnaissance, d’amour et d’admiration de la part des individus composant cette société. Le bien-être psychologique devenant alors possible en atteignant les standards de beauté et de performance, on ne cesse de s’imposer contraintes et sacrifices, qui sont malsains à des degrés différents : entraînements excessifs, contrôle du corps, prise de stimulants, régimes drastiques, et bien plus encore. La réalisation de soi ainsi que le besoin profond de se faire reconnaître, aimer et admirer s’avèrent donc des raisons psychologiques desquelles peuvent provenir les pratiques sportives malsaines. Par ailleurs, les pratiques néfastes entrent en jeu, dans le but de correspondre le plus possible aux critères de la société, lorsque se présente une faible estime de soi ou la dépression. Le dopage chez les jeunes en est encore un bon exemple, d’autant plus que deux des principaux motifs pour lesquels ils consomment des adjuvants chimiques sont justement une estime personnelle défaillante ou un état dépressif. Or, ceci constitue, une fois encore, des facteurs psychologiques provoqués par des facteurs sociaux. On peut donc en comprendre que certaines causes peuvent être le fruit de d’autres, et que, en fin de compte, elles s’emboîtent toutes. Bref, les facteurs internes et externes prennent bien souvent place les uns dans les autres.

En dépit du niveau supérieur auquel les standards de la société ont été élevés, il est bel et bien possible de les atteindre de manière à ne pas s’autodétruire, et ce, en ayant recours à des alternatives naturelles et saines. Certes, ces dernières demandent plus de temps, et donc de patience, avant de constater des résultats concrets, mais elles ne compromettent pas le corps ni le contenu de celui-ci, que ce soit sur le plan organique ou psychologique. D’ailleurs, comme le résume un célèbre proverbe, «tout vient à point à qui sait attendre», et cela ne pourrait pas mieux s’appliquer au phénomène des pratiques sportives néfastes. Or, il est évident que les moyens qui seront employés différeront d’un individu à un autre, car tous ne visent pas nécessairement le même objectif lors de leurs séances d’activité physique. S’il s’agit, par exemple, de gains musculaires, il faudra se baser sur trois optiques essentielles, à savoir la nutrition, l’entraînement et la récupération.

Bien sûr, les quatre groupes alimentaires sont toujours de mise pour un parfait équilibre de l’organisme, mais les glucides et les protéines, deux alliées s’amplifiant mutuellement lorsqu’elles sont combinées, fourniront de l’énergie à long terme pour une performance optimale et un gain de muscles plus rapide. La séance d’activité elle-même est à planifier selon ses objectifs personnels et ses propres capacités, ce qui influencera les différents paramètres, par exemple, d’un programme de conditionnement physique : charge soulevée, nombre de séries, nombre de répétitions par série, tempo, temps de repos, etc. Quant à la récupération, il est important de laisser les muscles se reconstruire et se détendre après la séance. Dépendamment de l’intensité et de la durée de celle-ci, il faut accorder au corps un arrêt allant de 24 à 48 heures. Pour de plus amples détails et conseils, ce ne sont heureusement pas les ressources qui manquent : entraîneurs, enseignants en éducation physique, nutritionnistes, documentation fiable… Il suffit de s’adresser aux bonnes personnes, de consulter des ouvrages d’auteurs certifiés, mais surtout, de faire confiance à cette machine si bien construite que constitue notre corps.

Maude Beaulieu et Pier-Alexandre Vallières, Cégep de Drummondville

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