«Les employés tombent comme des mouches»

«Les employés tombent comme des mouches»
Brigitte Roy, Nathalie Perron et Roberto Bomba ont parlé aux médias, mardi, au nom des membres de la FIQ (Photo : Frédéric Marcoux)

SANTÉ. La Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ) dénonce une situation devenue inacceptable pour les employés du CIUSSS de la Mauricie et du Centre-du-Québec. Un problème de gestion de personnel et d’heures supplémentaires obligatoires (TSO) a mené une vingtaine d’employés du Centre d’hébergement Frederick-George-Heriot à se faire entendre à Drummondville, mardi, lors d’une conférence de presse.

«C’est complètement inacceptable ce qui se passe sur le terrain présentement. À notre centre, on a neuf démissions dans les dernières semaines. On a aussi un taux d’assurance salaire inacceptable et le TSO ne cesse d’augmenter. Il faut trouver des solutions permanentes. Ce qu’on veut, c’est de la stabilité. Il faut qu’il y ait des changements pour assurer la pérennité (du centre)», affirme la présidente du FIQ, Nathalie Perron.

Selon le syndicat qui représente 75 000 travailleurs, des  infirmières auxiliaires, des inhalothérapeutes et des perfusionnistes, la situation est rendue à un point critique, puisque «les employés tombent comme des mouches».

«C’est une crise qu’on vit. Il y a des infirmières qui portent le fardeau du système de santé sur leurs épaules», fait valoir Roberto Bomba, trésorier de la FIQ.

«Une infirmière peut travailler de minuit à 8h, et là, à la dernière minute, un gestionnaire l’oblige à faire du temps supplémentaire pour un autre huit heures (sic)», relate-t-il en insistant sur le stress que cela cause aux employées et sur leur famille respective.

La solution

Selon Roberto Bomba, il est faux de prétendre que le système de santé manque de travailleurs. Il estime que le problème actuel est davantage lié à la gestion du personnel en place.

«Quand on entend les employeurs dire qu’ils manquent d’effectifs, c’est faux! On a les effectifs en place, il suffit de rehausser les postes», insiste-t-il.

Une infirmière a fait savoir à L’Express qu’il y a plus d’une trentaine de postes vacants présentement. Ce qui repousse les travailleurs est que ces postes offrent seulement deux jours de travail. Celle-ci ne cache pas qu’il est difficile de joindre les deux bouts en acceptant une offre du genre. Elle croit que les travailleurs se manifesteraient davantage si les postes étaient à temps complet.

«C’est rendu le bordel»

«Ça fait six ans que je travaille au centre et là je suis en arrêt de travail pour épuisement professionnel, de confier une infirmière sous le couvert de l’anonymat. Il y a six ans, on faisait un ou deux temps supplémentaires par année, mais pas plus (sic). À l’époque, j’avais 38 patients à ma charge. Cet été, c’est rendu le bordel : j’ai 80 patients à ma charge. On fait deux ou trois TSO par mois. Je n’étais plus capable d’endurer ça, j’étais sur le bord de la dépression. C’est stressant! Des fois, on n’a même pas le temps d’aller manger ou de prendre notre pause.»

Cette dernière insiste sur le fait qu’il n’est plus rare de faire des semaines de 56 heures qui incluent deux TSO. Dans ces conditions, cela fait en sorte qu’un poste temps plein peut devenir moins attrayant, selon elle.

Selon la vice-présidente du Syndicat de Drummondville, Brigitte Roy, la situation s’est grandement compliquée depuis la décision du gouvernement provincial de centraliser les soins de santé dans les différents CIUSSS. Elle souligne que dans le passé les travailleurs sautaient sur l’occasion de faire des heures supplémentaires, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui.

«Lors des vacances, on peut se retrouver avec une infirmière qui couvre trois départements, déplore Brigitte Roy. […] On aimerait avoir un ratio de patients, mais présentement, ça ne serait même pas réalisable. Nos infirmières sont à bout. On demande à notre employeur de créer des postes temps plein, mais on ne nous écoute pas».

Brigitte Roy et Éric Beaulieu.

Lorsqu’un travailleur met ses limites et refuse de faire des heures supplémentaires, il en paie les frais. C’est le cas de l’infirmier auxiliaire Éric Beaulieu qui a été suspendu le 22 août pour une journée.

«C’est une question de principe, argue-t-il. Ce n’est pas normal de travailler des journées de 16h. J’ai un papier médical de mon médecin qui dit que ce n’est pas bien de faire ça et je suis suspendu quand même. Ce n’est pas logique, considérant la situation actuelle. La situation a dégénéré depuis l’an passé. On nous avait dit que c’était exceptionnel, mais ça continue.»

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